19 avril 2019

Les Massacres du Triumvirat / Antoine Caron


Cette toile d’Antoine Caron a été peinte en 1566. À l’origine constituée d’un seul tenant, elle fut par la suite partagée en trois sections à une date inconnue. Conservé au Louvre depuis 1939, le tableau mesure 116 x 195 cm.

Cette peinture a fait l’objet de maintes analyses, études et présentations. Voyons les grandes lignes de sa description par les historiens de l’art Rose-Marie et Rainer Hagen, dans leur célèbre livre Les dessous des chefs-d’œuvre.

La toile est peinte à l’époque des guerres de Religion (1562-1598), alors qu’Antoine Caron (1521-1599) travaille au service de la reine Catherine de Médicis (1519-1589). Le peintre s’est formé auprès de maîtres italiens à Fontainebleau. Le commanditaire du tableau, catholique ou protestant, reste inconnu.

Le tableau illustre un épisode de l’histoire romaine. Après l’assassinat de César, en l’an 43 avant J.-C., Antoine, Octave et Lépide forment un triumvirat qui fait massacrer ses adversaires politiques. Antoine Caron suit le récit de l’historien grec Appien, mais il évoque aussi le triumvirat de son époque formé par les chefs catholiques Anne de Montmorency, François de Guise et Jacques d’Albon de Saint-André opposés à la politique d’apaisement de Catherine de Médicis.

Rose-Marie et Rainer Hagen soulignent ensuite la popularité de la cruauté et de la violence dans l’art et la vie de cette époque caractérisée par les guerres en Italie et les guerres de Religion.

Au sujet des monuments romains célèbres, les auteurs citent ensuite les sources et influences d’Antoine Caron qui n’est jamais allé à Rome, dont les Antiquités de Rome de Joachim du Bellay (1522-1560), les gravures d’Antoine Lafréry (1512-1577), ainsi que les œuvres architecturales et sculpturales réalisées sous François Ier (1494-1547) à Fontainebleau. Ainsi, la distribution et les proportions des édifices ne correspondent pas à la réalité.

L’ensemble du tableau est symétrique de part et d’autre de la place centrale. Celle-ci est étalée depuis les escaliers et balustrades, jusqu’au Colisée où le triumvirat siège et, en arrière-plan, le Panthéon. À gauche de cette place, la statue d’Apollon du Belvédère, la colonne de Trajan, l’arc de triomphe de Septime Sévère, le mausolée d’Adrien. À droite, l’empereur Commode en Hercule, l’obélisque, l’arc de triomphe de Constantin, la statue équestre de Marc-Aurèle et l’arc de triomphe de Titus.

Rose-Marie et Rainer Hagen concluent leur analyse en mettant en relief la contradiction entre la forme et le sujet de cette œuvre. Par exemple, les couleurs vives et claires des têtes coupées et des corps suppliciés, des bourreaux aux poses élégantes de danseurs, la petitesse des têtes. En quelques mots: «Le réalisme, excepté dans le détail architectural, n’a pas de place dans l’univers artistique de Caron. La construction du tableau repose sur des effets de contraste […]. Ordre et désordre sont intimement liés.»

Dans Les dessous des chefs-d’œuvre, la toile est reproduite en format réduit et en grand format. Plusieurs détails sont aussi reproduits: le bourreau debout au pied de la place centrale, le triumvirat siégeant au milieu du Colisée, le bourreau en train d’arracher le cœur d’une victime au pied de la place centrale, le mausolée d’Adrien bordant le Tibre et un ballet de bourreaux.


Comme les autres descriptions de Rose-Marie et Rainer Hagen, dans Les dessous des chefs-d’œuvre, leur étude sur Les Massacres du Triumvirat d’Antoine Caron est instructive et passionnante.

Par ailleurs, dans une étude antérieure, Jean Ehrmann s’attarde au contexte historique, aux caractéristiques fondamentales et aux éléments particuliers du tableau Les Massacres du Triumvirat.

La lecture de l’article L'œil médusé, par Valérie Auclair, s’avère tout aussi captivante.

Référence

Hagen, Rose-Marie et Rainer. - «Il peint Rome et parle de Paris» dans Les dessous des chefs-d’œuvre. Un regard sur les grands maîtres. - Cologne (Allemagne): Taschen, 2016. - 788p. - (Bibliotheca Universalis). - ISBN 978-3-8365-5925-6. - [Citation, p. 297]. - Bibliothèques de Montréal et BAnQ: 759 H143d 2016 et 759.94 H143d 2014.

Références complémentaires

Ehrmann, Jean. - Antoine Caron, peintre à la Cour des Valois, 1521-1599. - Introduction de Paul-André Lemoisne. - Genève: Librairie Droz et Lille: Libraire Giard, 1955. - 64p. + 32 planches. - [Voir Tableaux de Caron, p. 16-22, Note sur les tableaux des ‘Massacres du Triumvirat’, p. 48-50, Planche IV Massacre des Triumvirs (vers 1562) et Planche VII Massacres du Triumvirat (1566)]. - Bibliothèque centrale de Montréal [BAnQ]: 759.4 C293eh.

L'œil médusé. - Perspective et interprétations des Massacres du Triumvirat d'Antoine Caron (1566) - Valérie Auclair (Communication, 2009/2, n° 85, pages 79 à 101)

Image

Les Massacres du Triumvirat (Antoine Caron, 1566) [Photo © Musée du Louvre / A. Dequier - M. Bard — Photographies - Toute réutilisation non commerciale est autorisée sous condition de la mention de la source et de l’auteur.]

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