De si longues histoires / Micheline Dumont
L’autobiographie de la célèbre historienne québécoise débute par une photo et des souvenirs anecdotiques de sa petite enfance. Et déjà, le lecteur apprécie cette écriture mémorielle et chaleureuse :
« J’ai beau chercher, ce sont les seuls souvenirs qui me restent de mes premières années. Ils flottent dans ma mémoire, à la frontière de la conscience, comme des sensations fugitives. Parmi eux, plusieurs faux souvenirs qui m’ont été racontés. D’autres ont été fixés par des photographies dans un décor immobile, qui sera englouti dans la vie moderne sans que je m’en aperçoive. »
Les étapes de sa vie sont racontées d’une façon chronologique. En voici les jalons : enfance familiale (1935-1940), école primaire à Dorion (1941-1948), Couvent de Vaudreuil (1948-1952), Collège Marie-Anne de Lachine (1953-1957), Université de Montréal (1957-1959), premiers emplois (1959-1960), les années 1960, les années 1970, les années suivantes.
Les anecdotes mais surtout les faits marquants de sa vie sont relatées dans le contexte historique de chaque période. Ce qui rend son récit doublement captivant. Ainsi, elle raconte son enfance, pendant la crise économique, dans une famille nombreuse.
Les programmes d’études des niveaux primaire, secondaire et collégial sont présentés et commentés. Son intérêt pour la lecture, l’écriture et le théâtre est souligné. Son engagement dans la Jeunesse étudiante catholique (JEC) est notable et durable.
Au niveau universitaire, elle suit des cours en littérature, géographie et histoire. Le cours Méthodologie de l’histoire, donné par Guy Frégault, la marque profondément. La lecture du livre Le deuxième sexe de Simone de Beauvoir la transforme littéralement.
Ses premiers emplois sont diversifiés, par exemple la rédaction d’une biographie de l’écrivaine Laure Conan, des cours d’histoire donnés à l’École normale Cardinal-Léger, des consultations au Département de l’instruction publique.
Des événements majeurs dans sa vie personnelle surviennent dans les années 1960, dont son bref séjour à Québec en vue d’obtenir un doctorat, son mariage avec Rodrigue Johnson et les naissances de leurs trois filles, son séjour de deux ans à Paris pour les études doctorales de son mari, son retour à l’enseignement dans des écoles normales de Montréal, sa participation à la Commission royale d’enquête sur la situation de la femme au Canada.
Les années 1970 se déroulent à Sherbrooke où elle enseigne la didactique de l’histoire. Elle donne aussi de nombreuses conférences à divers publics et des formations pédagogiques pour le personnel enseignant de sciences humaines au primaire, tout en publiant plusieurs textes. Elle est de plus en plus sollicitée par des organismes, notamment en relation avec la condition féminine.
À la veille de ses 40 ans, elle est happée grièvement par un automobiliste. La convalescence est douloureuse et très longue. Au cours de cette période, l’autrice découvre qu’elle est féministe en lisant Ainsi soit-elle de Benoîte Groult. Après une autocritique sur ses années antérieures, elle décide alors qu’elle donnera un nouveau cours : Histoire des femmes au Québec. Elle conclut son dernier chapitre par ces mots : « Ma vie prend un nouveau sens. »
Dans l’épilogue, à grands traits, Micheline Dumont brosse un tableau de ses contributions à la société québécoise, notamment au mouvement féministe, au cours des années suivantes et même au-delà de sa retraite professionnelle.
L'historienne termine ainsi son autobiographie : « Toutes ces expériences de récits personnels m’ont incitée à entreprendre mon autobiographie. Or, ce voyage dans le temps a ouvert la boîte aux souvenirs. J’y ai découvert les longues racines de mon destin de femme et de mon engagement féministe. »
Souhaitons, sous peu, à madame Micheline Dumont et à son mari de mémorables célébrations à l’occasion de leur 60e anniversaire de mariage !
Référence
Dumont, Micheline. - De si longues histoires. L’histoire d’une historienne. - Montréal : Les Éditions du remue-ménage, 2022. - 271p. - ISBN 978-2-89091-799-6. - [Citation : p. 13-14].
Sur la Toile
Micheline Dumont, historienne féministe (Jean-François Nadeau, Le Devoir, 15 octobre 2022)
La petite histoire d’une grande historienne (Silvia Galipeau, La Presse, 18 octobre 2022)
Micheline Dumont (Plus de 100 textes publiés dans Le Devoir)
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