22 novembre 2014

Géopolitique de l’Asie centrale

Isabella Damiani, docteure en politiques transfrontalières, présente dans sa monographie une synthèse claire sur l’Asie centrale. L’ouvrage contient les parties suivantes: introduction, huit chapitres, conclusion, bibliographie, glossaire, index. Les illustrations sont nombreuses et limpides: cartes géographiques et historiques, tableaux, statistiques et chronologies.

Toponymie

La dénomination «Asie centrale» fait l’objet de l’introduction: Tartarie au 17e et 18e siècle, Turkestan au 18e et 19e siècle, Asie médiane après la soviétisation de la région dans les années 1920, puis Asie centrale depuis l’indépendance des cinq républiques (Kazakhstan, Kirghizstan, Ouzbékistan, Tadjikistan, Turkménistan) dans les années 1990.

La collection numérique de la Bibliothèque nationale de France (BnF) contient plusieurs cartes sur cette région, dont celles-ci: Tartarie (John Speed, 1626), Turkestan (Lusilin, 1876), Républiques soviétiques (URSS, 1926). Plusieurs autres cartes sur l’Asie centrale sont référencées dans le livre annoncé ci-dessous: Anciennes cartes géographiques.

Bases essentielles

Les quatre premiers chapitres présentent les bases essentielles à la compréhension de l’Asie centrale.

Le chapitre initial porte sur la diversité physique de l’Asie centrale. Le relief, du nord-est au sud-ouest: les chaînes de montagnes Altaï, Tian Shan, Pamir, Indus Kush et Kopet Dag. Le réseau hydrographique: les fleuves Tarim, Amou-Daria (Oxus), Syr-Daria (Yaxartes); les mers Caspienne et Aral; les Grands Lacs Issyk-Koul, Balkhach et Kara-Bogaz-Gol. Les zones arides (steppes et déserts), dont la vaste steppe kirghize et les oasis méridionales.

Le chapitre 2 présente les peuples centrasiatiques sous l’angle des relations entre les populations nomades turco-altaïques et les populations sédentaires de langue persane, depuis la préhistoire jusqu’à nos jours. Deux volets reçoivent un traitement spécifique: la sédentarisation des Ouzbeks et l’islamisation de l’Asie centrale caractérisée par son soufisme sunnite.

Le chapitre 3 retrace les jalons historiques de l’Asie centrale: l’empire de Gengis Khan et de ses descendants (unité et partitions), le «Grand Jeu» entre les empires britannique et russe (recensement de 1897), l’Union soviétique (Républiques socialistes), la résistance de l’Afghanistan (indépendant depuis 1919) à l’occidentalisation, la décolonisation (imprévue et improvisée) des républiques soviétiques en 1991. Outre une carte politique d’aujourd’hui, une chronologie complète ce chapitre.

Le chapitre 4 porte sur les rôles économiques assumés par l’Asie centrale jusqu’à nos jours. La première section repère trois phases historiques: le centre économique du monde, de l’Antiquité au 15e siècle, grâce à la route de soie; l’éclipse consécutive à la découverte de l’Amérique et aux liaisons maritimes substituées à la route de la soie; le nouvel enjeu énergétique depuis le tournant des 20e et 21e siècles. Trois enjeux géoéconomiques mondiaux sont ensuite identifiés : le pétrole, le gaz naturel et le coton. Les sections suivantes portent sur la construction de trois voies ferrées (1880, 1900, 1931) et de réseaux hydriques (canaux et réservoirs) par la Russie tsariste et soviétique. Les dernières sections abordent la catastrophe écologique de l’assèchement de la mer d’Aral et des conflits liés aux ressources aqueuses.

Dynamiques internes

Les chapitres 5 et 6 analysent les principales dynamiques inhérentes de l’Asie centrale.

Le chapitre 5 explique le découpage des frontières à l’époque soviétique selon une méthodologie ignorant les réalités ancestrales. Ce découpage a entrainé des conflits entre les nouvelles Républiques soviétiques centrasiatiques, en particulier pour la région du Ferghana. L’évolution urbaine et le nationalisme sont ensuite étudiés, celui-ci étant confronté à la résistance religieuse et au régionalisme (tribus et clans).

Le chapitre 6 décrit la géopolitique actuelle de chacune des cinq républiques indépendantes (Ouzbékistan, Turkménistan et Kazakhstan, Kirghizstan et Tadjikistan) et de leurs voisins (Afghanistan et région chinoise autonome du Xinjiang). Les historiques des régimes politiques internes sont relatés.

Relations internationales

Les chapitres 7 et 8 abordent les relations entre l’Asie centrale et le monde extérieur.

Le chapitre 7 pose le problème de l’enclavement des Républiques centrasiatiques postsoviétiques du point de vue des relations internationales: 1° l’Afghanistan, 2° les grandes puissances: Chine, Russie, États-Unis d’Amérique et Union européenne, 3° les puissances régionales: Iran, Inde, Pakistan et Turquie. Le problème de la drogue afghane est expliqué en fonction des différents acteurs. L’influence grandissante et déterminante de la Chine a trait aux ressources énergétiques et à la sécurité territoriale. Les liens commerciaux, et souvent militaires, avec la Russie sont maintenus. L’interventionnisme américain s’avère un échec. Les Européens s’intéressent aux ressources énergétiques, mais leur implication est minimale. Les relations avec l’Iran et la Turquie ont un caractère culturel, tandis que celles avec l’Inde et le Pakistan sont plus distantes.

Le dernier et court chapitre évoque la mondialisation. D’une part, la découverte du monde extérieur par les Centrasiatiques: cinéma indien, soutiens religieux musulmans, émissions télévisées occidentales (Euronews, Eurovision, Coupe du monde) par le filtre russe. D’autre part, la découverte des Centrasiatiques par le reste du monde: cinéma (film Borat, 2006), révolution touristique. Les conséquences néfastes de la mondialisation sont majeures en Asie centrale: narcotrafic et contrebande, pauvreté et violence, épidémie du sida.

Conclusion

L’auteure termine son ouvrage en trois points: une comparaison avec les révoltes arabes, le manque persistant de coopération entre les Républiques centrasiatiques et la fièvre identitaire répandue dans chacune d’entre elles.

Appréciation

Un livre passionnant! Une synthèse exemplaire pour mieux comprendre le monde contemporain de cette région vaste, diversifiée et stratégique.

Référence

Damiani, Isabella. - Géopolitique de l’Asie centrale. Entre Europe et Chine: le cœur de l’Eurasie. - Paris: PUF, 2013. 169p. - ISBN 978-2-13-061851-5. - BAnQ: nouveauté.

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