11 décembre 2023

Joseph Bouchette, cartographe de l’Empire britannique


L’œuvre de Bouchette - l’ensemble de ses travaux - s’inscrit dans le processus d’appropriation du territoire par l’Empire britannique, cela en étant en quelque sorte son principal « outil technique » ; c’est bien ce que notre étude cherche à démonter. Nous voulons mettre en lumière le lien qui s’articule entre l’État impérial et son agent royal qui reçoit le mandat d’observer et de représenter le territoire bas-canadien selon ses besoins.

Jérémie Lévesque-St-Louis présente une synthèse instructive et captivante sur la vie et les productions cartographiques de Joseph Bouchette (1774-1841), arpenteur général du Bas-Canada (1801-1840), sous le régime de l’Acte constitutionnel (1791-1840). Peu connu, ce personnage a tout de même joué un rôle clé dans l’histoire du Québec.

Dans son introduction, l’auteur spécifie les orientations générales de son étude : la reconnaissance territoriale britannique au lendemain de l’Acte constitutionnel et le rôle joué dans ce contexte impérial par l’arpenteur général Joseph Bouchette [JB]. Il précise que son étude détaillera les processus créatifs caractéristiques de l’œuvre de JB, écris, illustrations et cartes. La présentation des trois chapitres de son livre complète l’introduction.

Voyons le sommaire de chaque chapitre et les thèmes abordés dans chacun d’entre eux.

Le chapitre I esquisse un historique de l’arpentage en Amérique du Nord à l’époque de la colonisation, trace un portrait social et professionnel de JB, et présente une description générale des grandes réalisations topographiques du cartographe.

Ce chapitre s’attarde sur ces points particuliers : les buts de l’arpentage utilisé depuis l’Antiquité, notamment aux 17e et 18e siècles en Amérique du Nord; l’importance historique de l’arpenteur général Samuel Johannes Holland (1764-1801), oncle de JB; l’historiographie (succincte) consacrée à JB; les influences artistiques (François Baillargé et James Peachy) subies par JB; les liens de son père Jean-Baptiste Bouchette avec les autorités britanniques; le vaste et important réseau social de JB; les revenus et démêlés judiciaires (dettes) de JB; le contexte et la description des plus grandes productions cartographiques, les livres et cartes de 1815 et de 1831 de JB.

Le chapitre II est consacré aux dynamiques impériales de nature administrative, légale et économique en fonction du territoire colonial, ainsi qu’au rôle d’agent joué par JB dans l’appropriation de ce territoire par l’Empire britannique.

Ce chapitre s’attarde sur ces points particuliers : la genèse et les caractéristiques de l’Empire britannique; la politique d’accommodation envers la population canadienne conquise; les lois commerciales et la Guerre d’indépendance de treize colonies américaines; implication de JB dans les délimitations de la frontière entre les colonies britanniques et la République des États-Unis d’Amérique; l’arrivée massive de loyalistes; les implications politiques, démographiques, économiques et cartographiques de l’Acte constitutionnel de 1791; l’apport de JB dans l’aménagement (création et délimitation de cantons peuplés d’immigrants anglo-protestants) et l’exploitation (ressources naturelles) du territoire bas-canadien; l’effacement des populations autochtones; le réaménagement des structures administratives métropolitaines et coloniales; les commandes impériales envers ses administrateurs nord-américains.

Le chapitre III examine plus en profondeur les productions de JB et ses méthodes de travail, en particulier sur le terrain, ainsi que son rôle dans l’appropriation du territoire par les autorités britanniques.

Ce chapitre s’attarde sur ces points particuliers : l’homologation des propriétés foncières, tant privées que publiques; le cadre légal de l’arpentage arrêté en 1785; les interventions de JB dans des litiges fonciers dans des seigneuries (mesures françaises) et des cantons (mesures anglaises); la formation et l’engagement de nouveaux arpenteurs; la pratique de l’arpentage (instruments de mesure); le fonctionnement du bureau de l’arpenteur général (centre de communication, atelier de travail pour les arpenteurs et commis); la direction et la coordination du travail des arpenteurs assumées par JB; les instruments utilisés sur le terrain (chaîne, goniographe, théodolite); l’exemple d’un camp de base; l’implantation de nouveaux cantons pour étendre l’écoumène; les deux modèles de concessions des terres; des statistiques sur les immigrants; les ressources propres à favoriser le mercantilisme (agriculture, chanvre, bois) ; l’expansion du réseau de communication.

Dans sa conclusion, l’auteur souligne l’attachement personnel et professionnel de JB envers et au service de l’Empire britannique. « Par l’importance de sa fonction et l’ampleur de sa production écrite et cartographique, notre personnage est en soi un objet d’étude particulièrement riche, qui peut encore procurer un savoir historique pertinent. »

Préfacé par Dany Fougères, l’ouvrage contient également une table des matières, une liste des figures, des remerciements, une carte-bibliographie et une bibliographie.

Appréciation

Une étude originale et captivante sur l’appropriation du territoire laurentien par les autorités britanniques grâce au travail déterminant de l’arpenteur général Joseph Bouchette. À l’image de familles cartographiques françaises, comme celle des Cassini, l’auteur explique le contexte familial des cartographes canadiens aux 18e et 19e siècles. Un livre qui permet de découvrir et de connaître le métier d’arpenteur au 19e siècle. Un ouvrage qui suscitera sûrement de nouvelles recherches basées sur la riche documentation produite par Joseph Bouchette.

Soulignons également le style d’écriture limpide de Jérémie Lévesque-St-Louis et la mise en page exemplaire de l’ouvrage.

Référence

Lévesque-St-Louis, Jérémie. - Retracer le territoire, tracer le pays. L’arpenteur général Joseph Bouchette, 1791-1840. - Préface par Dany Fougères. - Québec : Les Presses de l’Université Laval (PUL), 2023. - xvi, 172 p. - (Autour de l’événement). - ISBN 978-2-7663-0280-2. - [Citations : p. 47, 162].

Remarque

Ce livre est basé sur les travaux de recherche de l’auteur dans le cadre de sa maîtrise en histoire à l’Université du Québec à Montréal (page 2, note 1) :

Lévesque-St-Louis, Jérémie, « Retracer le territoire, tracer le pays : l'arpenteur-général de la couronne britannique Joseph Bouchette et l'appropriation du territoire canadien (1791-1840) », Mémoire, Université du Québec à Montréal (UQAM), Maîtrise en histoire, 2021, 181 p. - [Version numérique].

Carte

1815 - Bas-Canada (Joseph Bouchette) - BAnQ.

Un détail de cette planche est affiché sur la page de couverture; voir aussi La publication de 1815, p. 33-40.

Cette carte et d'autres cartes de Joseph Bouchette sont référencées dans le nouvel Atlas du Québec en Amérique et dans le monde. Ce livre numérique peut être consulté directement en ligne, sans téléchargement préalable.

06 décembre 2023

Un voyage dans l’univers des plantes

Ce livre traite des plantes dont les feuilles, fleurs, graines, fruits, pousses, sève ou racines sont odoriférantes ou de saveur sucrée, amère ou piquante et qui, en petite quantité, rehaussent le goût des aliments, améliorent notre santé, ou donnent des fragrances agréables. Ces plantes utiles envahissent notre vie.


Les Éditions MultiMondes viennent de publier un superbe livre grand format intitulé Botanica. Sous la direction de Ross Bayton, l’ouvrage présente un voyage historique et scientifique dans l’univers des plantes.

Le livre compte cinq chapitres dont les contenus sont détaillés dans le Sommaire : généralités, arbres et arbustes, vivaces, annuelles et bisannuelles, fougères et autres organismes.

La mise en page est très aérée pour chacune des plantes sélectionnées : nom de la plante (nom commun, nom scientifique), brève introduction, exposé, fiche signalétique, encadrés, œuvres artistiques et photos légendées.

Les espèces sont généralement présentées sur une double page, mais quelques plantes sont décrites sur quatre ou six pages :

- arbres et arbustes : Eucalyptus commun, Sureau noir, Gui, Arbre à myrrhe, Rosier des apothicaires, Lavande vraie, Thym commun ;

- vivaces : Piment, Curcuma, Ail, Sauge officinale, Mélisse officinale, Absinthe, Gingembre, Menthe poivrée, Aloe vera, Ortie commune ;

- annuelles ou bisannuelles : Pavot à opium, Chanvre cultivé, Petite camomille, Souci officinale, Basilic sacré ;

-fougères et algue : Grande fougère, Capillaire de Montpelier ; Dulse.

Les chapitres sont entrecoupés par des pages thématiques : Soins de la peau, Religion et rituels, Parfums et senteurs, Aromates, Bonnes pour le cerveau, Soutiens du système nerveux, Aides à la digestion, Anti-inflammatoires, Santé reproductive, Poisons et substances toxiques, Coutumes et traditions, Santé respiratoire. Pour chacune de ces pages, une brève introduction présente le thème abordé, suivie d’un grand nombre de plantes illustrées et légendées.

Le chapitre liminaire dédié à des généralités botaniques porte sur ces éléments : classification des plantes, types de plantes, parties utilisables, principes actifs, médecines anciennes (chronologie illustrée), préparations, médicaments modernes, cosmétiques (chronologie illustrée), plantes aromatiques en cuisine, cuisines du monde (tableau illustré), symbolisme des plantes.

L’ouvrage encyclopédique est complété par un glossaire, un index, un avertissement et les remerciements (crédits photographiques).

Référence

Bayton, Ross et autres. - Botanica. Un voyage historique et scientifique dans l’univers des plantes. - Traduit par Sylvie Deraime et Valentine Palfrey. - Montréal : Éditions MultiMondes, 2023. - 304 p. - ISBN 978-2-8977-3342-1. - [Citation : p. 10].

Image

Cardamome, Elettaria cardamomum, Zingiberaceae © 2018, Claude Trudel, Le monde en images, CCDMD.

Parfois nommée la « reine des épices », la cardamome est réputée pour sa saveur aromatique… et son prix élevé. Son usage remonte aux débuts de la médecine ayurvédique et à l’Antiquité grecque et romaine. (Botanica, p. 174)

La Collection de Claude Trudel compte plusieurs milliers de photos botaniques. Les photos originales ont une résolution de 2048 x 1152 pixels, mais elles sont aussi disponibles aux formats 320 x 180 pixels, 800 x 450 pixels, 1024 x 576 pixels et 1920 x 1080 pixels. Les photos peuvent être vues individuellement ou en diaporama. Elles peuvent aussi être envoyées au format carte postale virtuelle. Sous une licence CC BY-NC-SA, les photos peuvent être utilisées gratuitement à des fins éducatives non commerciales.

Sur la Toile (albums photos gratuits)

Écorces d’arbres et d’arbustes
Plantes alimentaires
Plantes traditionnelles

12 novembre 2023

Pour une autohistoire amérindienne / Georges E. Sioui


Cet ouvrage est né du fait que l’histoire conventionnelle est incapable de produite un discours respectueux des Amérindiens et de la perception qu’ils ont d’eux-mêmes et du monde, et qui serai propre à harmoniser la société.

Le livre de Georges E. Sioui, premier Amérindien à obtenir un doctorat en histoire au Canada, comprend une préface de Bruce G. Trigger, une introduction, six chapitres, une conclusion, un épilogue, une annexe, des notes et une bibliographie.

Introduction

L’introduction débute par le récit d’un traumatisme que l’auteur a subi à l’âge de six ans après avoir reçu sa première leçon d’histoire du Canada. Ce cours typique de l’enseignement traditionnel de l’histoire véhiculait des préjugés insultants, méprisants et dégradants envers les Autochtones.

Georges E. Sioui poursuit son exposé en confrontant les philosophies des deux sociétés : la théorie de l’évolutionnisme propre à la société dominante et le système de valeurs propre aux sociétés autochtones américaines.

L’auteur présente enfin les objectifs de sa démarche méthodologique d’autohistoire amérindienne et le plan de son ouvrage.

Autohistoire amérindienne

Les chapitres sont ainsi intitulés :

I - L’Amérique : la maladie a eu raison du diable
II - Le Cercle sacré de la vie
III - La conception amérindienne de l’être humain
IV - La destruction de la Huronie par les Iroquois
V - Lahontan, découvreur de l’américité
VI - La dispersion des Hurons-Wendat

Dans le chapitre initial, l’auteur insiste sur l’importance des épidémies causées par les microbes importés par les Européens pour expliquer l’effondrement démographique autochtone : « De 112 millions d’habitants en 1492, la population aborigène des Amériques est passée, en 400 ans, à environ 5,6 millions. »

Dans le chapitre suivant, l’historien Georges E. Sioui dénonce et réfute la théorie de l’évolutionnisme qui considère les sociétés autochtones inférieures à la société dominante. En contrepartie, il expose la philosophie autochtone : « La réalité du Cercle sacré de la vie, dans lequel tous les êtres, matériels et immatériels, sont égaux et interdépendants, imprègne toute la vision amérindienne de la vie et de l’univers. »

Le troisième chapitre, portant sur la conception amérindienne de l’être humain, présente les valeurs amérindiennes essentielles, leur universalité et leur persistance.

Le quatrième chapitre traite des relations internationales amérindiennes avant et après le premier contact avec les Européens, les faits étant interprétés selon l’autohistoire préconisée par Georges E. Sioui. Plusieurs extraits de témoignages de première source (Marie de l’Incarnation, Jean-François Lafitau, Samuel de Champlain) et d’écrits contemporains (Francis Parkman, Karl H. Schlesier, Elizabeth Tooker, J. N. B. Hewitt, John A. Dickson, Bruce G. Trigger, John Mohawk, Robert E. Berkhofer, Doug George) sont cités. Les thèmes suivants sont abordés spécifiquement : épidémies, guerres, valeurs traditionnelles amérindiennes, traitement des captifs, cruauté, cannibalisme, moralité, respect entre les sexes, fidélité à la parole donnée, respect dû aux âmes des ancêtres.

Le cinquième chapitre est dédié à Louis Armand de Lom d’Arce, baron de Lahontan : « l’œuvre de Lahontan eut une influence incontestable et incontestée sur les plus grands de son époque […] ». Selon Georges E. Sioui, ce jeune intellectuel français fut « capable de capter et de décoder l’essence de l’être amérindien ». Il s’attarde particulièrement à l’analyse de cinq thèmes abordés par Adario et Lahontan dans les Dialogues de M. le baron de Lahontan et d'un sauvage, dans l'Amérique : la religion, les lois, le bonheur, la médecine et la santé, l’amour et le mariage.

Le dernier chapitre porte sur la dispersion des Hurons-Wendat, la dépossession de leur territoire québécois dans la région de Québec et leur lien ancestral avec les Nadouek laurentiens [Iroquoiens du Saint-Laurent].

Conclusion

La phrase liminaire de la conclusion est citée au début de cette recension.

En conclusion, Georges E. Sioui revient sur certains thèmes abordés au cours de son exposé : les maladies épidémiques sont la cause de l’holocauste amérindien ; la pérennité des sociétés autochtones ; le mythe de l’évolution ; la possibilité d’écrire l’histoire des Amérindiens à partir de leurs valeurs traditionnelles ; l’importance de l’écologie pour toutes les sociétés.

Épilogue

L’auteur préconise l’avènement d’une nouvelle science : « Dans la conjoncture actuelle (crise aiguë d’ordre écologique et spirituel), l’amérologie , plus qu’une méthode et une discipline, représente une nouvelle conscience humaine et une réflexion sur la signification même du mot civilisation. »

Annexe

Intitulé Le problème indien : un ultime regard, l’annexe porte sur la jurisprudence panaméricaine discriminatoire envers les Autochtones. Selon Georges E. Sioui, « Il est urgent de renoncer à la notion euro-américaine des droits d’occupation et au concept même de découverte. […] Le problème indien que nous connaissons aujourd’hui est un legs idéologique de l’époque coloniale. »

Préface

Bruce G. Trigger (1937-2015), professeur au département d'anthropologie de l’Université McGill, souligne notamment le caractère novateur de l’autohistoire amérindienne définie et préconisée par Georges E. Sioui.

Référence

Sioui, Georges E. - Pour une autohistoire amérindienne. - Préface par Bruce G. Trigger. - Québec : Les Presses de l’Université Laval (PUL), 2018 [2023] © 1989. - xxii, 166p. - (Collection À propos). - ISBN 978-2-7637-4188-8. - [Citations : p. 131, 1, 9, 15, 85, 142, 147]. - Bibliothèques de Montréal et BAnQ : 970.00497 SIO [2018] et 970.004970072 S6184p 2023.

Sur la Toile

L’Amérindien philosophe (Entrevue avec Georges E. Sioui, propos recueillis par Francis Dupuis-Déri, Argument, vol. 2, no. 2, Printemps-été 2000) - [Version au format PDF].

Extrait (conclusion) : « J’ai d’ailleurs toujours regretté que le Québec ne devienne pas un leader quant aux relations entre les Euro-américains et les populations indigènes. Je viens du Québec et j’y ai beaucoup d’intérêt émotif et historique. Pour moi, le Québec pourrait jouer presque naturellement un rôle de leader, car le contact français a été beaucoup plus humaniste que le contact espagnol, portugais, hollandais et anglais. Lahontan en est une preuve. Mais les politiciens québécois ont perdu ce fil historique... »

Carte

1632 - Nouvelle-France - [Samuel de Champlain, Paris : L. Sevestre,1632] - Carte de la Nouvelle France, augmentée depuis la dernière, servant à la navigation faicte en son vray meridien, par le Sr. de Champlain capitaine pour le Roy en la Marine lequel depuis l'an 1603 jusques en l'année 1629 ; a descouvert plusieurs costes, terres, lacs, rivières et nations de sauvages, par cy devant incognuës, comme il se voit en ses relations quil a faict imprimer en 1632, ou il se voit cette marque ... ce sont habitations qu'ont faict les François

Cette carte est référencée dans l’Atlas du Québec en Amérique et dans le monde. - [Livre numérique gratuit].

05 novembre 2023

Une exploration du monde végétal


Ce livre propose une exploration du monde végétal saisi à travers l’histoire, la diversité, la beauté et l’importance des spécimens qui le composent. — David M. Moore

Préfacé par David M. Moore, professeur de botanique à l’Université de Reading (Angleterre), le livre Les trésors de la végétation est composé de deux grandes parties : Le monde des plantes et Les régions du monde. Il est complété par un glossaire, une bibliographie, des remerciements et un index.

La première partie porte sur l’histoire des plantes, leur environnement, leur utilisation par les humains et les menaces à leur existence.

La seconde partie contient un ou plusieurs chapitres sur ces régions: le continent américain, l’Europe, le Proche-Orient, l’Afrique, l’Asie et l’Océanie. Je me suis attardé aux chapitres consacrés au continent africain.

Trois chapitres couvrent l’Afrique septentrionale, centrale et australe. L’exposé relate l’histoire de la région étudiée, les caractéristiques du climat et de la végétation. Plusieurs plantes sont citées en exemple. La documentation est enrichie par une carte régionale avec une légende des régions floristiques, des encadrés thématiques et un tableau statistique (pays concernés, variétés spécifiques, espèces en danger, plantes indigènes utiles et toxiques, jardins botaniques). Par ailleurs, chaque chapitre est illustré de photos. Les dernières pages de chaque chapitre sont dédiées à des phénomènes particuliers : Les dernières forêts de Somalie, Incendies des savanes, Curiosités des déserts.

Un livre instructif fort intéressant !

Référence

Moore, David M., dir. - Les trésors de la végétation. - Traduit par Étienne Leyris et Jean-Pierre Michel. - Amsterdam (Pays-Bas) : Éditions Time-Life, 1991. - 256 p. - ISBN 978-2-7344-0598-9. - [Citation : p. 7]. - [Voir : Afrique septentrionale, Afrique centrale, Afrique australe, p. 178-203].

Image

Palmier d’arec, Chrysalidocarpus lutescens, Arecaceae, Madagascar, Jardin botanique de Montréal.

Sur la Toile

Base de données des plantes d’Afrique (Conservatoire et Jardin botanique de Genève & South African National Biodiversity Institute) - [Plantes référencées sous quatre zones : Afrique du nord, Afrique tropicale, Afrique australe, Madagascar].

White, F. - La Végétation de l’Afrique. - [Mémoire accompagnant la carte de végétation de l’Afrique UNESCO/AETFAT/UNSO]. - 1986, 384p. - ISBN : 978-2-7099-0832-8.

21 octobre 2023

Qimmik / Michel Jean


Le nouveau roman de Michel Jean, Innu de Mashteuiatsh, met en relief le monde nomade traditionnel des Inuit et l’impact de la sédentarisation forcée de ce peuple nordique.

Les lieux où se déroulent les péripéties du récit sont localisés sur deux cartes géographiques insérées au début du livre. De magnifiques photos de chiens nordiques canadiens sont insérées ici et là au cours du récit.

Tous les chapitres ont un titre court et significatif. Par exemple, ceux des premiers chapitres : Nunavik, Omble, Pêcheurs, Longue-Rive. Sans dévoiler l’intrigue, voyons un aperçu de ces chapitres liminaires.

Le chapitre initial présente l’Arctique québécois d’une façon succincte et saisissante : « Le ciel, le roc, l’océan. […] Nulle part la vie n’est plus âpre. […] Sur ce continent longtemps oublié, les humains vivent avec leurs qimmiit, leurs chiens. » Tout au long du récit, les milieux naturels où se déroulent les péripéties sont décrits à merveille.

Le chapitre suivant met en scène les jeunes Saullu et Ulaajuk lors d’une pêche à l’omble de l’Arctique. Après avoir relaté cette pêche, la narratrice exprime son amour envers son compagnon : « Je crois que c’est la première fois de ma vie que j’ai éprouvé le sentiment d’être amoureuse. »

Tout en contraste, un événement perturbateur surgit au chapitre 3. Il est amené d’une façon subtile et inattendue. Il aura des implications et répercussions sur la suite des événements.

Le chapitre 4 débute par cette interjection : « Qimmik! Qimmik! » Au cours du récit, le lecteur apprendra le nom, puis le prénom, de cette seconde narratrice, une avocate. Car la structure narrative se complexifie dès lors par une double et ingénieuse narration. Les liens entre les personnages et les événements sont désormais liés, mais n’en disons pas davantage.

J’avais trouvé passionnante la lecture de Kukum, et ce nouveau roman est tout aussi captivant. Les péripéties s’enchaînent d’une façon ingénieuse et saisissante. Les dialogues, les descriptions et les portraits sont à la fois simples et exemplaires.

L’auteur a l’art de romancer des événements historiques d’une façon percutante.

Référence

Jean, Michel. - Qimmik. - Longueuil (Québec) : Les Éditions Libre Expression, 2023. - 219p. - ISBN 978-2-7648-1631-8. - Citations : p. 13-14, 17, 21. - Les collections des Bibliothèques de Montréal et BAnQ contiennent plusieurs exemplaires du roman.

Extrait du roman (page 36) : On dit « un Inuk », « deux Inuuk ». « Inuit » est le pluriel pour trois et plus. Sans s.

Image

Établissement de la Compagnie de la Baie d’Hudson sur une dune de sable à Great Whale River dans la baie d’Hudson (Pierre Dagenais, photographe, 1944) - BAnQ : CC BY NC ND.

12 octobre 2023

Atlas du Québec en Amérique et dans le monde


Atlas du Québec en Amérique et dans le monde


Présentation

Ce nouvel atlas contient trois types de ressources cartographiques:

1° un répertoire chronologique de cartes et de plans (accessibles sur la Toile) depuis le 16e siècle jusqu’à nos jours;

2° l’analyse d’une vingtaine de cartes et de plans;

3° une bibliographie thématique exhaustive.

Ce livre numérique gratuit peut être reproduit d’une façon identique à des fins éducatives non commerciales.

Description détaillée

Le monde de la cartographie est fascinant et les ressources pour l’explorer sont multiples, tout particulièrement pour le territoire québécois. Ce livre propose trois types de documentation : un répertoire chronologique de cartes et de plans, depuis le 16e siècle jusqu’à nos jours; plusieurs cartes et plans commentés; une bibliographie exhaustive.

Le Répertoire chronologique débute par une introduction portant sur quatre volets : les sources cartographiques utilisées et des définitions relatives aux cartes géographiques et aux cartes historiques; la périodisation propre à l’histoire du Québec; la présence continue des Autochtones et le partage de leurs précieuses connaissances géographiques avec les Européens; des témoignages sur la redéfinition de la nature des cartes par des historiens contemporains.

Les vingt documents présentés dans la partie intitulée Cartes commentées sont à différentes échelles. Ils portent sur plusieurs thématiques, dont les explorations et les explorateurs, la navigation et l’hydrographie, les rivalités impérialistes, les ressources, la géologie, la topographie, la colonisation, le système seigneurial et le lotissement des cantons, le développement urbain, les pistes cyclables.

Les nombreuses ressources documentaires de la Bibliographie sont regroupées par affinité : Collections numériques, Outils de recherche, Ouvrages généraux, Études particulières, Cartes historiques, Ressources complémentaires. Plusieurs références sont directement accessibles sur la Toile.

Référence

Atlas du Québec en Amérique et dans le monde

22 septembre 2023

Découvrir et comprendre l’art contemporain

Les questions de Dominique Bénard et d’Anne-Marie Houdeville,
artistes plasticiennes.

Les réponses d’Alain Bourdie,
conférencier en histoire de l’art et enseignant d’arts plastiques.

Un livre pour s’initier d’une façon décontractée à l’art contemporain.

Je me sens désemparé devant les œuvres contemporaines

Tel est le titre du chapitre initial.

L’œuvre Le Pot doré (1985, Jean-Pierre Raynaud) est reproduite au début du chapitre.

Les auteurs proposent d’abord quatre moyens pour aborder une œuvre d’art contemporain :
1° mettre nos a priori de côté
2° décrire les éléments de l’œuvre
3° lire le cartel
4° prendre conscience de son ressenti au contact de l’œuvre.
S’il y a lieu, en complément : consulter des ressources documentaires.

À titre d’exemple, les auteurs utilisent ensuite cette méthode d’analyse pour explorer l’œuvre Red Plank (1967, John McCracken) affichée sur la page couverture du livre.

Enfin, les auteurs terminent leurs observations et explications par une conclusion sur l’impact artistique de Red Plank dans l’histoire de l’art contemporain.

Les autres chapitres sont présentés d’une façon aussi captivante : un titre accrocheur, une reproduction ou plus d’œuvres exemplaires, des angles d’analyses variés, des anecdotes surprenantes.

L’ouvrage est complété par des annexes : notes, suggestions de lectures pour chaque chapitre, crédits photographiques, tableau récapitulatif sur les courants artistiques de l’art contemporain.

Somme toute, un guide instructif, un contenu captivant, une mise en page remarquable.

Référence

Bourdie, Alain ; Bénard, Dominique ; Houdeville, Anne-Marie. - Découvrir et comprendre l’art contemporain. - Montréal : Hurtubise, 2011. - 159p. - ISBN 978-2-8964-7554-4. - Bibliothèques de Montréal et BAnQ : 709.04 B769d 2011.

12 septembre 2023

Plantes indigènes des pays slaves


Plantes indigènes des pays slaves


Cet album présente une sélection de photos de plantes indigènes des pays slaves. Ces photos illustrent également la diversité et la richesse des collections végétales du Jardin botanique de Montréal.

Chaque plante photographiée est ainsi identifiée : nom vernaculaire en français, nom vernaculaire en anglais, nom scientifique de l’espèce en latin (genre et épithète spécifique et, s’il y lieu, sous-espèce ou variété), nom scientifique de la famille botanique en latin.

À titre indicatif, les pays slaves sont ainsi regroupés : groupe occidental, groupe oriental, groupe méridional. Les flores citées dans les références contiennent plusieurs descriptions d’espèces affichées dans l’album.

Les liens pointent sur les photographies affichées en haute résolution sur le site Le monde en images.

L’album est complété par un jeu-questionnaire, des références (photographies, ressources, documentation), un index des familles botaniques, un index des noms latins (incluant des références), et une notice sur le droit d’auteur.

Référence

Plantes indigènes des pays slaves

Ce livre numérique gratuit peut être reproduit d’une façon identique à des fins non commerciales.

25 août 2023

Iroquoiens du Saint-Laurent : étude de paysages du passé


L’objectif de cette recherche est d’apporter une contribution à la compréhension de la nature et de l’étendue des modifications du paysage végétal par les Iroquoiens du Saint-Laurent.

L’ethnologue et ethnobotaniste Daniel Fortin présente une étude originale, instructive et fascinante. Précédé par des remerciements, la table des matières et l’introduction, la recherche présente huit thématiques. Les huit chapitres sont ainsi structurés : introduction, exposé (sous-titré et illustré), conclusion, notes. L’ouvrage est complété par une conclusion et une bibliographie exhaustive (28 pages).

L’introduction contient trois volets : l’approche pragmatique retenue par l’auteur, l’hypothèse de base sur la transformation de l’environnement de la vallée du Saint-Laurent par les Iroquoiens, la présentation succincte des thèmes abordés dans les différents chapitres.

Le chapitre 1 est consacré à l’emploi et à la portée de certains termes, dont ceux-ci : empreinte humaine (villages iroquoiens du Haut-Saint-Laurent), climax, hominidés considérés comme organismes, niche écologique, paysage.

Le chapitre 2 aborde ces points : la méthodologie adoptée par l’auteur, la difficile interprétation des données paléoécologiques, la nécessité d’une intégration interdisciplinaire, la sélection des sources utilisées (écrits, cartes et plans, bibliographies produites par Gordon M. Day et William Cronon).

Le chapitre 3 décrit la construction de niche chez les Autochtones de l’est de l’Amérique du Nord. L’utilisation des brûlis, contrôlés ou non, était alors courante, comme l’attestent de nombreux témoins des premiers contacts entre Autochtones et colons européens. Cette pratique favorisait notamment la chasse, ainsi que la cueillette des glands, des noix et des fruits.

Le chapitre 4 présente une étude paléoécologique des sédiments du lac Crawford (Ontario). L’auteur retient l’hypothèse de la transformation de l’environnement dans cette région au cours de la période 1360-1650 par une occupation iroquoienne.

Le chapitre 5 explique les techniques agricoles des Iroquoiens, selon le procédé des monticules et de la polyculture des trois sœurs : le maïs, les haricots et les cucurbitacées (courges). Les besoins en matériaux ligneux (maisons longues, palissades) et l’usage des brûlis contrôlés sont aussi illustrés. Les sources documentaires de l’auteur proviennent notamment des recherches de Conrad E. Heidenreich (Ontario) et Henry T. Lewis (Alberta), et des témoignages de Jean de Brébeuf, Samuel de Champlain, Gabriel Sagard et Pehr Kalm.

Le chapitre 6 porte le territoire, le mode de vie et la population des Iroquoiens du Saint-Laurent. Deux cartes historiques sur Iroquoiens du Saint-Laurent permettent de localiser leurs regroupements dans la vallée laurentienne. Vers 500, les Iroquoiens de la région de Montréal dépendent de la chasse, de la pêche et de la cueillette. Après la révolution horticole, entre 1000 et 1300, s’ajoute la culture des trois sœurs. L’Iroquoisie laurentienne aurait compté entre 8 000 et 10 000 personnes au début du 16e siècle. La troisième partie du chapitre aborde les épidémies affectant les Autochtones après les premiers contacts avec les Européens, possiblement dès le début du 16e siècle.

Le chapitre 7 étudie des écrits de la Nouvelle-France : des textes décrivant les paysages découverts par les Français, dans un premier temps, puis des plans et des cartes de Samuel de Champlain, dans un deuxième temps. Plusieurs témoignages sont cités, dont ceux de ces auteurs : Jacques Cartier, Jean Alfonse, Samuel de Champlain, Pierre Boucher, Louis Nicolas, François Gendron, René Bréhan de Galilée, Dollier de Casson, baron de Lahontan. Les plans de ces endroits sont reproduits et analysés : Port Saint-Louis, Chouacouët, Le Beau port, Tadoussac, région de Québec, Grand Sault Saint-Louis. La carte manuscrite de 1607 et une section de la carte de 1632 sont aussi reproduites et analysées. Au terme de son étude, l’auteur affirme « qu’une partie de la vallée laurentienne et des territoires adjacents présentaient des paysages anthropiques qui découlaient de la construction de niche des Autochtones ».

Le chapitre 8 porte sur la technologie des feux anthropiques dans les marais de la Réserve nationale de faune du Lac-Sani-François (réserve iroquoise d’Akwesasne). Les conséquences de la pratique du brûlis contrôlé, ou son absence sont décrites avec minutie. Une carte du territoire et plusieurs photos illustrent les propos de l’auteur. L’auteur conclut le chapitre en proposant des mesures réparatrices à l’invasion de l’algue rugueuses et du roseau commun, en particulier le recours aux brûlis contrôlés.

La conclusion contient une rétrospective des hypothèses et des données étudiées dans l’essai. Les résultats de ces analyses sont nuancés, tout en soulignant l’apport probable du brûlis contrôlé pour la constitution de la niche iroquoienne dans la vallée du Saint-Laurent.

Référence

Fortin, Daniel. — La vallée laurentienne au XVIe siècle, entrevoir la construction de la niche des Iroquoiens du Saint-Laurent. Étude de paysage du passé. — Québec : Les Éditions GID, 2023. — 278 p. — ISBN 978-2-89634-443-7. — [Citations : Introduction, p. 16 ; Chapitre 7, p. 206].

Carte

1632 — Nouvelle-France — Carte de la Nouvelle France, augmentée depuis la dernière, servant à la navigation faicte en son vray meridien, par le Sr. de Champlain capitaine pour le Roy en la Marine : lequel depuis l’an 1603 jusques en l’année 1629 ; a descouvert plusieurs costes, terres, lacs, rivières et nations de sauvages, par cy devant incognuës, comme il se voit en ses relations quil a faict imprimer en 1632, ou il se voit cette marque… / Samuel de Champlain. — [BAnQ - Domaine public au Canada].

Une section de cette carte est reproduite à la page 204 du livre de Daniel Fortin, puis commentée à la page 205.

18 août 2023

L’Atlas des atlas / Philip Parker


Maps are always carried an ideological freight. The very earliest were attempts to understand and organize the world in terms that made sense to the viewers. [...] Maps could be statements of belief, of power, of agency, long before they were viewed as an attempt to mirror reality on the ground.

L’historien Philip Parker vient de publier un livre fort intéressant sur la cartographie : The Atlas of Atlases. La mise en page et la présentation graphique des documents cartographiques sont exemplaires.

Précédé d’une introduction, le livre compte 10 chapitres :

1 — La préhistoire des atlas (jusqu’en c. 1200)
2 — Le monde en expansion : les premiers atlas (c 1200-1492)
3 — Nouveaux horizons (1500-1550)
4 — L'âge d’or des atlas (1550-1600)
5 — Des atlas diversifiés (1600-1700)
6 — Cartographier la nation (1700-1800)
7 — L’apogée de la cartographie impériale (1800-1900)
8 — L’atlas et la guerre (1900-1950)
9 — Un atlas de la société (1950-2000)
10 — Un atlas sous un autre nom (2000-).

Le livre est complété par des notes et des références, dont plusieurs sites de cartographie, un index, les crédits des reproductions cartographiques, une notice biographique et les remerciements d’usage.

La genèse des atlas et leur évolution au cours de l’histoire sont relatées d’une façon captivante. Les innovations des grands cartographes sont signalées, tout comme leurs rivalités professionnelles. La transmission des savoirs est particulièrement bien mise en évidence. Par ailleurs, l’emprise des grandes dynasties familiales de cartographes est soulignée.

Référence

Parker, Philip. - The Atlas of Atlases. — Londres : Ivy Press (Quarto Publishing), 2022. - 272 p. — ISBN 978-0-7112-6805-0. — [Citation : p. 6-7]. — BAnQ : 912.09 P2425a 2022.

Image

1656 — Nouvelle-France — Le Canada, ou Nouvelle France, & c : ce qui est le plus advancé vers le Septentrion est tiré de diverses relations des Anglois, Danois, & c., vers le midy les costes de Virginie, Nouvlle Suede, Nouveau Pays Bas, et Nouvelle Angleterre, sont tirées de celles des Anglois, Hollandois, & c., la Grande Rivière de Canada ou de St Laurens, et tous les environs sont suivant les relations des François / Nicolas Sanson — BAnQ (Document dans le domaine public au Canada).

Cette carte est reproduite à la page 157 du livre, et contextualisée aux pages 156-157.

07 août 2023

Grammaire graduelle du français / Céline Narjoux


« L’approche de la Grammaire graduelle du français est claire, systématique et concrète. » (Céline Narjoux)

Quel plaisir de découvrir et d’explorer une nouvelle grammaire !

Pour avoir un aperçu de cette grammaire, passons en revue les parties liminaires : la préface de Mary-Annick Morel, l’avant-propos de l’autrice, le mode d’emploi et le sommaire.

Préface

Mary-Annick Morel indique le lectorat visé par la Grammaire graduelle du français, notamment les futurs enseignants, les enseignants en poste et les lecteurs désireux d’approfondir leurs connaissances. Les innovations remarquables de cette grammaire sont soulignées : l’actualisation de la Nouvelle grammaire française (Maurice Grevisse, André Goosse, 1995), les nombreux et divers outils facilitant la consultation de l’ouvrage [table des matières détaillée, index exhaustif, remarques et réflexions, exemples et extraits d’auteurs contemporains], et les particularités de la langue française.

Avant-propos

Céline Narjoux évoque d’abord le contexte de la publication de sa Grammaire graduelle du français: la détermination de l’éditeur d’actualiser la Nouvelle grammaire française des éminents linguistes belges Maurice Grevisse et André Goosse, son intérêt pédagogique comme enseignante de la grammaire française sur les textes littéraires auprès de futurs enseignants.

L’autrice précise ensuite sa démarche. Dans un premier temps, l’exploration des grandes lignes de la grammaire française selon les conceptions scientifiques actuelles, soit l’étude des éléments constitutifs du fonctionnement de la langue d’une façon systématique et graduelle [phonétique, phonologie, morphologie, orthographe, lexicologie, syntaxe, pragmatique]. Dans un deuxième temps, le souci de répondre à des questions relatives aux acquis de la linguistique moderne et aux débats contemporains sur certains points particuliers, en plus d'une aide méthodique spécifique à la préparation des concours.

Enfin, l’autrice complète son exposé sur ces points : les exemples littéraires et forgés, les corrections orthographiques adoptées en 1990, et les remerciements d’usage.

Mode d’emploi

La Grammaire graduelle du français se caractérise par son organisation et sa mise en page didactiques. Ces traits exemplaires sont illustrés dans la présentation du mode d’emploi : les repères graphiques, les abréviations et symboles, l’alphabet phonétique international et les tests opératoires.

Au nombre de sept, les repères graphiques portent sur ces éléments :

- notions de base (premier niveau de lecture et premier niveau d’exemple)
- approfondissements (second niveau de lecture et second niveau d’exemple)
- encadrés méthodologiques (questions spécifiques ou pratiques)
- remarques (exception, cas particulier, confusion possible, histoire, fait régional)
- sigle T (signalement d’un test opératoire pour vérifier le fait)
- page de couleur bleue (renvoi pour approfondir ou faire le point sur la notion)
- pistes de lecture à deux niveaux (bibliographie sommaire à la fin de chaque chapitre).

Les tests opératoires [manipulations linguistiques] sont exemplifiés : commutation ou substitution, permutation ou déplacement, réduction ou effacement, addition ou expansion, transformation.

Sommaire

Le sommaire compte vingt-deux pages. C’est dire qu’il est très détaillé. En d’autres termes, c’est un outil de repérage sensationnel. Voici ses grandes divisions :

Parties liminaires (sommaire, préface, avant-propos, mode d’emploi)
Partie 1 - Les sons, les lettres, les mots : de l’oral à l’écrit
Partie 2 - Les parties du discours
Partie 3 - La phrase
Partie 4 - La phrase complexe
Partie 5 - Le texte et le discours
Parties complémentaires (Liste alphabétique des verbes irréguliers et des verbes défectifs, Liste des encadrés méthodologiques, Index).

Exemples

Les encadrés méthodologiques sont nombreux et leurs contenus sont à la fois captivants et instructifs. En voici quelques-uns à titre d’exemple :

Quelles sont les fonctions de la ponctuation ?
Comment étudier la ponctuation dans un texte ?
Comment étudier et distinguer les formes en -ant ?
Donc conjonction de coordination ou adverbe ?
L’exclamatif est-il un type ou une forme de la phrase ?
Comment étudier le phénomène de l’accord ?
Comment identifier une relative explicative ?
Que sont les maximes conventionnelles ?
Comment étudier les discours rapportés ?

Complétons ce survol en citant la définition de la phrase : « La phrase est l’unité de communication linguistique, c’est-à-dire qu’elle ne peut pas être subdivisée en deux ou plusieurs suites constituant chacune un acte de communication linguistique ». Cette définition fait l’objet de plusieurs explications, d’exemples multiples, et de trois remarques ad hoc. (p. 443-444)

Référence

Marjoux, Céline. - Le Grevisse de l’étudiant. Grammaire graduelle du français. - 2e édition. - Préface de Mary-Annick Morel. - Louvain-la-Neuve (Belgique) : De Boeck Supérieur, 2021. - 784p. - ISBN 978-2-8073-3359-8. - [Citation liminaire, p. 30]

Articles connexes

Grammaire méthodique du français (2019)
Le Grevisse de l’enseignant. L’analyse des textes (2018)
Mieux enseigner la grammaire (2016)
La phrase / règles, exercices et corrigés (2016)
Antidote 9 / Correcteur, dictionnaires et guides (2016)
La grammaire au secondaire (2015)
Multidictionnaire de la langue française (2015)
Sémantique conceptuelle du français (2014)
Une nouvelle grammaire pratique (2013)
Multidictionnaire électronique (2013)
Le français apprivoisé (2012)
Référentiel des connaissances en français (2012)
L’express grammatical pour le secondaire (2011)
La grammaire moderne (2008)
Arabesques (2008)
Dictionnaires de la langue française (2008)
Glossaire du parler français au Canada (2006)
La norme réelle du français québécois (2006)

Image

Anémone hépatique (Liverleaf), Anemone hepatica [Hepatica nobilis], Ranunculaceae © Claude Trudel, Le monde en image, CCDMD. Photo tirée du nouvel album Plantes de France.

La Collection de Claude Trudel compte plusieurs milliers de photos botaniques. Les photos originales ont une résolution de 2048 x 1152 pixels, mais elles sont aussi disponibles aux formats 320 x 180 pixels, 800 x 450 pixels, 1024 x 576 pixels et 1920 x 1080 pixels. Les photos peuvent être vues individuellement ou en diaporama. Elles peuvent aussi être envoyées au format carte postale virtuelle. Sous une licence CC BY-NC-SA, les photos peuvent être utilisées gratuitement à des fins éducatives non commerciales.

06 août 2023

Complexe des sciences de l’Université de Montréal

Le Complexe des sciences a été construit en 2016-2019, la passerelle Marcelle-et-Jean-Coutu en 2017-2018 et l’inauguration du campus MIL s’est déroulée en 2019.

Les bâtiments des départements de chimie (Centre régional de résonance magnétique nucléaire), de physique (Institut de recherche sur les exoplanètes), de sciences biologiques (Centre sur la biodiversité) et de géographie ont été construits au cours de la phase initiale.

Le bâtiment du département des mathématiques, de l’actuariat et de la statistique, ainsi que le bâtiment du département de l’informatique et de la recherche opérationnelle (intelligence artificielle) seront ajoutés au cours de la phase II.

Une sélection de photos du nouveau campus MIL, photos prises depuis le sud (station de métro Outremont) en allant vers le nord (station de métro Acadie) :

Référence

Campus MIL (Université de Montréal)

03 août 2023

Windows 11 pour les nuls

Avec humour et précision, Andy Rathbone présente le nouveau système d’exploitation de Microsoft.

L’introduction contient les éléments propres à la collection Pour les nuls des Éditions First Interactive : une présentation des buts, des modes d’utilisation et des pictogrammes du guide.

La table des matières détaillées permet un survol des chapitres du livre :

1° survol général (démarrer, bureau, fenêtres, dossier, fichiers)
2° programmes, applications et fichiers
3° Internet (navigateur Edge, courriel)
4° paramètres (écrans, périphériques, date et heure, comptes d’utilisateurs)
5° musique, films, télévision, photos
6° résolution des problèmes
7° 10 choses détestables et 10 choses adorables de Windows 11.

Un index complète l’ouvrage, suivi de plusieurs pages lignées pour prendre des notes.

Les explications sont structurées et limpides. Elles sont exemplifiées par de nombreuses captures d’écran. Les astuces et conseils sont abondants et pertinents.

Un guise pratique et agréable à consulter.

Référence

Rathbone, Andy. - Windows 11 pour les nuls [version 22H2]. - 2e édition. - Paris : First Interactive , 2023. - 393p. - (Pour les nuls). - ISBN 978-2-4120-8220-1. - Bibliothèques de Montréal et BAnQ : 005.446 M626.6r 2023 et 005.446 M6268r 2023.

Sur la Toile

Microsoft offre un aperçu des fonctions dans Windows 11 23H2 (Mark Hachman, adapté par Célia Séramour, Le Monde informatique, 25 Juillet 2023).

Articles connexes (versions précédentes)

Windows 10 et Internet (2016)
Guide sur Windows 8 (2013)
S’initier à Windows Vista (2008)

22 juillet 2023

Contes de la Montagne sereine


Les Éditions Gallimard viennent de rééditer le recueil intitulé Contes de la Montagne sereine. Cet ouvrage fut initialement édité sous les Ming, vers 1550, par le grand bibliophile Hong Pian (Hong Zimei).

*

Le traducteur français Jacques Dars relate dans son introduction les découvertes successives des vingt-sept contes populaires au début du 20e siècle, au Japon et en Chine. Il décrit ensuite les traits spécifiques de ces récits anciens désignés sous le nom huaben, c’est-à-dire livret, fascicule, petit recueil de récits ou d’histoires.

Dans la longue préface, Jeannine Kohn-Étiemble aborde le genre huaben sous l’angle d’une problématique diachronique, sociologique et linguistique. Son analyse repose sur son métier de comparatiste et généraliste : « Toute littérature fut d’abord populaire ; littérature populaire et orale, d’où elle émergea en élaborant et perlaborant des thèmes itératifs et des formes quasi figées, pour devenir enfin littérature écrite : conte, récit, nouvelle, épopée, roman, poésie ; tressant parfois, et même souvent, la matière et la manière de la littérature populaire pour donner un roman d’aventures. »

La préfacière traite spécifiquement de ces sujets : les interprétations de Vladimir Propp (Morphologie du conte, Les Racines historiques du conte merveilleux), et de Jacques Le Gorf et Emmanuel Le Roy (Mélusine maternelle et défricheuse) ; la condition féminine dans diverses sociétés (Histoire de Lotus à la verve intarissable, dans le recueil, Décaméron, de Boccace) ; le thème de l’anneau ; l’art du conteur (gestuelle et narration stéréotypées).

Jeannine Kohn-Étiemble conclue ses propos en identifiant le huaben au genre récit, voire nouvelle, plus encore que du conte.

*

Les Contes de la Montagne sereine sont regroupés en cinq parties :

Recueil de la fenêtre pluvieuse
Recueil de l’appui sur l’oreiller
Recueil de contes 1
Recueil de contes 2
Recueil de contes 3.

Les notes du traducteur sont regroupées à la fin de l’ouvrage.

*

Présentons, à titre d’exemple, le conte intitulé Liu Qiqing rime et potaille au Pavillon-où-contempler-le-fleuve (Recueil de contes 1, p. 221-226), un conte jamais traduit dans aucune langue.

Selon André Lévy, cité par Jacques Dars, les poèmes insérés dans le récit sont truffés d’allusions érotiques pouvant relever d’une tradition burlesque populaire (voir les notes 11 et 20, page 519).

La structure générale du conte est stéréotypée : prologue [poème liminaire] → introduction [auteur, époque, protagoniste] → élément déclencheur et péripéties → conclusion.

Les transitions entre les séquences narratives sont également stéréotypées, par exemple : adonc, un jour, au bout de deux mois, il y avait, ce jour-là, parlons maintenant, quand, cette nuit-là, soudain.

Dans quelle maison trouver tendre donzelle plus belle que Heng’Ee

Ce premier vers du poème liminaire évoque la déesse de la Lune, l’immortelle Chang’e. [Soulignons que ce nom mythologique a été repris récemment par l’Administration spatiale nationale chinoise pour désigner sa mission à destination de la Lune.] Ce vers et les suivants annoncent le caractère érotique du récit.

L'introduction identifie l’auteur du conte, Liu Yong, l’époque de l’histoire, celle du règne de l’empereur Shenzong, de la dynastie des Song, et le protagoniste Liu Qiqing. La présentation de celui-ci par le narrateur est dithyrambique : « Il avait juste vingt-cinq ans, était d’une beauté fascinante, d’une grande liberté d’allure, et doué de capacités hors du commun. » Son occupation de prédilection est la fréquentation des courtisanes. Trois hétaïres entretiennent d’ailleurs le jeune mandarin.

Un jour, Liu Qiqing va au Pavillon-où-contempler-le-fleuve, situé à Jinling [Nankin], pour admirer le paysage. Complètement ivre, il compose au pinceau un poème à chanter intitulé « La Belle Yu », puis retourne dans la capitale. Cet épisode sera évoqué ultérieurement en écho, d’où le titre du conte.

Sa réputation de lettré exemplaire incite les hauts fonctionnaires à proposer à l’empereur la nomination de Liu Qiqing au poste de sous-préfet à Yuhang, une ville située au nord-ouest de la capitale impériale Hangzhou. Suggestion acceptée. Une fois de plus, le narrateur fait l’éloge du protagoniste : « En vérité, c’était un magistrat incorruptible dans son administration, un juge sans ambiguïté dans les affaires judiciaires! »

Au bout de deux mois, Liu Qiqing fait construire à ses frais un pavillon imitant celui de Jinling. Dénomme Pavillon-où-contempler-le-fleuve, ce bâtiment est destiné à son plaisir. Un jour, après un banquet donné à cet endroit, Zhou Yuexian refuse les avances de Liu Qiqing. Frustré, le mandarin recourt à un stratagème pour obtenir les faveurs de la très belle chanteuse-prostituée Immortelle-de-la-lune. Un franc succès pour son initiateur, mais jugé fort différemment par la victime :

Quel détestable sort que d’être courtisane,
Et, en butte aux outrages, de ne rien oser dire!

À la fin du récit, le narrateur précise que durant les trois années que Liu Qiqing fut en poste à Yuhang « tous deux s’aimaient de tout cœur ». Leur séparation fut « chagrin des deux côtés » (poème de conclusion anonyme).

Référence

Collectif. - Contes de la Montagne sereine. - Traduction, introduction et notes par Jacques Dars. - Préface par Jeannine Kohn-Étiemble. - Paris : Gallimard, 2023 © 1987, 554p. - (Connaissance de l’Orient) - ISBN 978-2-07-299283-4. - BAnQ et Bibliothèques de Montréal : 895.134608 C7618 1987 et 398.2 C761.

Articles connexes

Au bord de l’eau
Le crime de Lotus-d’or
Introduction aux Spectacles curieux
Le plus grand poète chinois : Li Bo

Sur la Toile

Bibliographie des travaux sinologiques de Jacques Dars (Pierre Kaser)

Image

Lac de rêve (Jardin de Chine, Jardon botanique de Montréal) © 2021, Claude Trudel, Le monde en images, CCDMD.

La Collection de Claude Trudel compte plusieurs milliers de photos botaniques. Les photos originales ont une résolution de 2048 x 1152 pixels, mais elles sont aussi disponibles aux formats 320 x 180 pixels, 800 x 450 pixels, 1024 x 576 pixels et 1920 x 1080 pixels. Les photos peuvent être vues individuellement ou en diaporama. Elles peuvent aussi être envoyées au format carte postale virtuelle. Sous une licence CC BY-NC-SA, les photos peuvent être utilisées gratuitement à des fins éducatives non commerciales.

06 juillet 2023

Empire ottoman, par Edhem Eldem


Si l’histoire ne change pas vraiment, l’historiographie est constamment en mouvement, dans le but avoué d’affiner notre compréhension du passé, non par une quête futile d’une vérité que les historiens ont depuis longtemps reléguée au statut de fantasme positiviste, mais par la recherche de moyens pour mieux cerner cet enchevêtrement de réalités.

Prologue

Le Que sais-je? inédit du professeur Edhem Eldem sur l’histoire de l'Empire ottoman débute par un long prologue. Comme l’atteste la citation ci-dessus, les considérations de l’auteur sur la notion historiographie, en général, et de l’historiographie de l’Empire ottoman, en particulier, sont tout aussi remarquables que pertinentes.

L’historien cite ensuite les nombreux facteurs favorisant la réinterprétation de l’histoire de cet empire (1299-1923) : « Si l’on voulait les résumer en une phrase, il conviendrait probablement de dire que d’une structure principalement narrative et descriptive nourrie par une causalité parfois simpliste et souvent forcée, l’histoire s’est acheminée vers un discours de plus en plus analytique et critique fondé sur un raisonnement complexe et divers. »

La suite du prologue traite des nouvelles sources documentaires, puis des visions traditionnelles et dominantes de l’histoire de l’Empire ottoman, tant en Occident qu’en Turquie.

Empire ottoman

Intitulé Naissance et essor d’un État, le chapitre 1 aborde d’une façon chronologique l’histoire de l’Empire ottoman, depuis sa naissance en 1299 jusqu’à la prise de Constantinople en 1453. Après avoir présenté les origines obscures du fondateur Osman (1258-1326/1326) et du terme ottoman, l’auteur relate les conquêtes successives des Ottomans en Anatolie et dans les Balkans, puis les circonstances de la prise et de l’occupation de la capitale byzantine par Mehmed II.

Les chapitres 2 et 3 sont thématiques. Intitulés respectivement Un empire est né et Rapports de force, ils contiennent la description de l’évolution des structures impériales sous le règne de Mehmed II (1432-1481). Ces institutions perdureront au cours des règnes suivants : symbolisme, islamisation, esclavage (janissaires), absolutisme, codification des lois, règle de succession, gestion des religions et des classes sociales, statut de la progéniture du sultan.

Le chapitre 4, à caractère événementiel et intitulé Le siècle d’or?, est consacré aux règnes de Mehmed II (conquêtes consécutives à la chute de Constantinople), Bayezid II (1447-1512), Selim Ier 1470-1520), Süleyman (1494-1566), surnommé Soliman le Magnifique en Occident, et Selim II (1524-1574). Au cours de cette période, les relations politiques et diplomatiques, ainsi que les conflits militaires, s’intensifient entre l’Empire ottoman et les puissances occidentales (Charles Quint, François Ier). Les relations avec l’Iran sont aussi conflictuelles. Une carte intitulée Expansion de l’Empire ottoman (1300-1683) est insérée à la fin de ce chapitre.

Le chapitre 5 intitulé Les rouages du pourvoir traite des relations diplomatiques inégalitaires entre l’Empire ottoman sous Soliman le Magnifique et les puissances européennes. Les capitulations sont expliquées dans ce contexte. Le second volet du chapitre porte sur la comparaison entre les armées et marines en présence, dans le contexte du débat historiographique sur le déclin de la puissance ottomane.

Les caractéristiques de l’économie ottomane, comparées à celles de l’Espagne, de la France, de l’Angleterre et des Pays-Bas, sont présentées dans le chapitre 6 intitulé Économie. L’étendue spatiale de l’Empire ottoman, l’emprise de l’État et la nature essentiellement agraire de l’économie, laissait peu de place au développement des autres secteurs.

Le chapitre 7, intitulé Société et cultures, est l’un des plus intéressants. La société est abordée en comparant l’Empire ottoman à l’Europe contemporaine : « L’Empire ottoman était pluriel en ce sens qu’il était humainement et culturellement formé d’un très grand nombre de communautés extrêmement variées. […] Il ressort de ces cas une pratique européenne – chrétienne – reposant sur un binôme qui restera longtemps étranger au monde ottoman : l’expulsion et l’assimilation. » Ces explications permettent de mieux comprendre le monde actuel. Les diverses cultures de l’Empire ottoman sont détaillées sous ces volets : architecture, littérature, peinture, calligraphie et artisanat.

Les chapitres 8 et 9 sont événementiels. Le chapitre 8, intitulé Les défis de la modernité, est divisé en trois parties : les crises et les transformations (guerres et conscrits, successions impériales, femmes de pouvoir), l’empire en difficulté (développement des contre-pouvoirs et pertes territoriales), le calme avant la tempête (influences extérieures, commerce international, avancée de la Russie en mer Noire).

Intitulé Une fin interminable, et précédé par une carte sur les Pertes territoriales de l’Empire ottoman (1774-1914), le dernier chapitre est aussi divisé en trois parties : le rapprochement forcé avec l’Europe (réformes de Mahmud II et révoltes en Grèce et en Égypte), la ruée vers l’Occident (égalité des sujets et crise globale), le repli et l’effondrement (règne d’Abdülaziz, guerres et massacres).

Compléments

L’ouvrage est complété par une bibliographie et la table des matières. La bibliographie est ainsi ventilée : ouvrages de synthèse; pour en savoir plus; récits et textes ottomans disponibles en français; auteurs contemporains à découvrir en français sur le site Gallica (Bibliothèque nationale de France); Bibliothèques d’Orient (BnF) et Centre d’études turques, ottomanes, balkaniques et centrasiatiques (CETOBaC).

Appréciation

L’intérêt de ce livre est multiple : les considérations historiographiques développées dans le prologue, la contextualisation des faits marquants de l’histoire et des traits sociaux de l’Empire ottoman, la comparaison entre l’évolution de cet empire et celle des empires européens. Soulignons aussi la clarté des propos et la structure de l’exposé.

Référence

Eldem, Edhem. - L’Empire ottoman. - Paris : Humensis, 2022. - 128p. - (Que sais-je?, n° 4226. - Inédit. - [Citations : p. 3-4, 4-5, 78-79]. - BAnQ : 956.1015 E375e 2022.

Image

Tulipe (Tulipa, Liliaceae) © 2016, Claude Trudel, Le monde en images, CCDMD.

Céramique d’Iznik (Turquie), Jardin de la Paix, Jardin botanique de Montréal. – Inauguré le 18 mai 2000, ce jardin thématique a été réalisé sous les auspices et grâce aux contributions du bureau du maire de la Ville de Montréal, de la communauté turque de Montréal et de la Fondation des céramiques d'Iznik de Turquie.

La Collection de Claude Trudel compte plusieurs milliers de photos botaniques. Les photos originales ont une résolution de 2048 x 1152 pixels, mais elles sont aussi disponibles aux formats 320 x 180 pixels, 800 x 450 pixels, 1024 x 576 pixels et 1920 x 1080 pixels. Les photos peuvent être vues individuellement ou en diaporama. Elles peuvent aussi être envoyées au format carte postale virtuelle. Sous une licence CC BY-NC-SA, les photos peuvent être utilisées gratuitement à des fins éducatives non commerciales.

16 juin 2023

L’Univers dévoilé : 400 ans d’instruments astronomiques


Johan Mazoyer, de l’Observatoire de Paris, relate en quelques pages les grandes étapes de l’histoire de l’astronomie en mettant l’accent sur les instruments innovants utilisés depuis 1609. Auparavant, les données astronomiques étaient relevées par l’usage exclusif de la vision humaine.

Lunette

Étape 1 - La lunette de Galilée (1609) : utilisation d’une lunette de verre de 5 cm constituée de deux lentilles convexes

Télescopes terrestres

Étape 2 - Le télescope de Newton (1668) : utilisation d’un miroir concave de métal poli pour focaliser la lumière

Étape 3 - Le télescope de Foucault (1862) : utilisation d’un miroir de verre recouvert d’une fine couche d’argent

Étape 4 - L’utilisation de l’optique adaptative (fin des années 1990) pour corriger les erreurs optiques introduites par l’atmosphère

Télescopes spatiaux

Étape 5 - Le télescope Hubble (1991) ayant un miroir primaire de 2,4 m, puis le télescope James-Webb (2021) ayant un miroir primaire de 6,5 m.

Chacune de ces étapes est expliquée par l’auteur - la description du nouvel instrument et son apport révolutionnaire dans la connaissance de l’espace et de l’Univers.

Plusieurs illustrations enrichissent l’exposé :

- Very Large Telescope (VLT)
- schéma de la lunette de Galilée et du télescope de Newton
- réplique du télescope optique original de Newton
- peinture de Bertin montant Galilée et sa lunette
- Grande lunette de l’Observatoire de Paris
- assemblage des segments du miroir primaire du Keck
- télescopes américains du Keck.

Un article introductif intéressant sur l’évolution des observations astronomiques, à l’image des autres articles de ce hors-série de la revue L’éléphant.

Référence

Mazoyer, Johan. - « De la lunette de Galilée au télescope Webb : 400 ans d’instruments astronomiques ». - Dans Voyage aux confins de la connaissance : l’Univers dévoilé. - Paris : Scrineo, 2022. - ISBN 978-2-3816-7166-6. - L’éléphant, la revue de culture générale. - Hors-série, novembre 2022, p. 44-51. - ISSN 2495-0599. - BAnQ : 523.1 V975 2022.

Image

Télescope spatial James-Webb - Observatory Webb’s Mirrors - James Webb Space Telescop (Photo: NASA/Chris Gunn)

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Trente images révélant l'Univers (Jean-René Roy)

06 juin 2023

L’Infini dans un roseau / Irene Vallejo


L’essai de l’écrivaine espagnole Irene Vallejo sur L’invention des livres dans l’Antiquité commence par une chevauchée d’hommes et se termine, comme un écho, par une chevauchée de femmes.

♦ Prologue : « De mystérieux groupes d’hommes à cheval sillonnent les chemins de Grèce. Dans leurs champs ou depuis la porte de leurs cabanes, les paysans les observent avec méfiance. L’expérience leur a appris que seuls voyagent les gens dangereux : soldats, mercenaires et trafiquants d’esclaves. »

♦ Épilogue : « Une petite troupe de chevaux et de mules s’aventurent chaque jour sur les pentes glissantes et dans les ravins des Appalaches, avec des sacoches pleines de livres. Les cavaliers sont, pour la plupart, des femmes – amazones des lettres. […] Les familles des condamnés de la montagne sentent une peur diffuse, primaire, à l’arrivée d’étrangers. […] Ils ne l’avoueraient jamais, mais ces femmes à cheval leur inspirent l’effroi. »

Les cavaliers antiques sont en quête de livres, alors que les cavalières contemporaines sont à la recherche de lectrices et de lecteurs. Ces deux temps de la narration illustrent l’importance accordée aux livres, pour diverses raisons, et leur singulière histoire depuis leur lointaine invention.


Le livre d’Irene Vallejo, Prix des lecteurs / Sélection 2023, est constitué de deux parties : La Grèce imagine l’avenir et Les chemins de Rome. Il est complété par des remerciements, des notes, une bibliographie et un index des noms propres.

L’autrice raconte les origines de l’écriture et de la lecture, puis les péripéties marquantes de l’évolution de ces deux inventions tout au long de l’histoire (surtout occidentale). Les débuts des bibliothèques sont aussi esquissés au cours de l’exposé.

Le récit est émaillé d’anecdotes et de citations, parfois savantes, mais plus souvent savoureuses. Les événements passés sont évoqués en lien avec les événements contemporains, comme des aller-retour entre les générations et les siècles.

La contextualisation des personnages historiques, de leurs propos et de leurs écrits est remarquable. Elle rend captivante la lecture de cette fresque historique. L’index des noms d’auteurs permet d’ailleurs de les retrouver par la suite.

Un livre qui se lit comme un roman !

Référence

Vallejo, Irene. - L’infini dans un roseau. L’invention des livres dans l’Antiquité. - Traduit de l’espagnol par Anne Plantagenet. - Paris : Les Belles lettres, 2023 © 2021. - 669p. - (Le Livre de poche, n° 36781). - ISBN 978-2-253-10748-4. - [Citations : p. 11, 597-598]. - Prix national de l’essai 2020 (Espagne). - Bibliothèques de Montréal et BAnQ / Édition 2021 : 002.0901 VAL et 800 V.

Image

Papyrus du Nil (Egyptian Paper Reed), Cyperus papyrus 'Graceful Grasses King Tut', Cyperaceae © 2016, Claude Trudel, Le monde en images, CCDMD.

La Collection de Claude Trudel compte plusieurs milliers de photos botaniques. Les photos originales ont une résolution de 2048 x 1152 pixels, mais elles sont aussi disponibles aux formats 320 x 180 pixels, 800 x 450 pixels, 1024 x 576 pixels et 1920 x 1080 pixels. Les photos peuvent être vues individuellement ou en diaporama. Elles peuvent aussi être envoyées au format carte postale virtuelle. Sous une licence CC BY-NC-SA, les photos peuvent être utilisées gratuitement à des fins éducatives non commerciales.

Sur la Toile

Irene Vallejo présente L'Infini dans un roseau (YouTube, 04:22 min, 9 juillet 2021)
Irene Vallejo Moreu - L'infini dans un roseau : l'invention des livres dans l'Antiquité (YouTube, 09:30 min, 6 novembre 2021)
«L’Infini dans un roseau»: tablettes et papyrus (Christian Desmeules, Le Devoir, 11 décembre 2021)
L'Infini dans un roseau : L'invention des livres dans l'Antiquité (Babelio)

Article connexe

Le livre et la bibliothèque

01 juin 2023

Histoire du Coran

Les Éditions du Cerf viennent de publier l'Histoire du Coran: contexte, origine, rédaction, sous la direction des professeurs Mohammad Ali Amir-Moezzi (ÉPHE/PSL) et Guillaume Dye (ULB):

« Ce livre est une monumentale introduction sur le monde qui a vu naître le Coran. Elle vise à présenter tout ce qui se passe en Arabie et autour d’elle au moment de l’avènement de Muhammad et comprend trois parties. La première est consacrée aux contextes historique et géographique du Coran et des débuts de l’islam. […] La deuxième partie envisage le Coran comme un carrefour de traditions, et comme point de rencontre de plusieurs religions de l’Antiquité tardive. […] La troisième et dernière partie aborde le corpus coranique proprement dit […]. »

Mohammad Ali Amir-Moezzi et Guillaume Dye

Survol

- Notices sur les 21 auteurs (professeurs et spécialistes), p. 7-16
- Préface, p. 17
- Introduction générale, p. 19-35
- Avis au lecteur (dates, traductions, transcriptions, abréviations), p. 37-39
- Repères historiques (chronologie), p. 41-43
- Cartes (empires omeyyade et abbasside), p. 44-45
- Partie I / 4 chapitres, p 47-287
- Partie II / 11 chapitres, p. 289-681
- Partie III / 7 chapitres, p. 683-1075
- Remerciements, p. 1077-1078
- Table des matières, p. 1079-1092.

Sauf exception, les auteurs et livres cités sont intégrés dans les exposés, plutôt que référencés en bas de page. Les chapitres sont complétés respectivement par une bibliographie, et plusieurs d’entre eux par une table des figures.

Introduction générale

Le premier paragraphe rappelle d’abord deux approches envers le Coran, la première étant exégétique, la seconde étant critique et scientifique. L’ouvrage Histoire du Coran relève de la seconde approche.

Mohammad Ali Amir-Moezzi et Guillaume Dye relatent ensuite les études critiques et scientifiques sur le Coran, considéré dans sa forme textuelle reçue et en amont des traditions exégétiques plus tardives. Cette rétrospective remonte au 19e siècle et s’étend jusqu’à nos jours.

La présentation du contenu de l’ouvrage est suivie de considérations sur l’histoire et les historiens des religions, en particulier de l’islam.

Les auteurs complètent leurs propos en spécifiant le but de leur démarche: « La mission de Mohammad, transformée rapidement après sa mort en religion impériale, ainsi que des messages qui l’ont accompagné gardent encore une large part de mystères. Le livre que voici est une quête au sein du domaine énigmatique de ces mystères. »

Essais (exemples)

Partie I / chapitre 1 – L’Arabie préislamique (101 pages), par Christian Julien Robin

L’auteur réinterprète l’histoire de la péninsule arabique à la lumière des plus récentes découvertes archéologiques et épigraphiques. Dans un deuxième temps, avec moult exemples, il présente les apports de ces sciences auxiliaires de l’histoire à la compréhension du texte coranique. Plusieurs illustrations enrichissent l’exposé. Outre les livres et les articles listés dans la bibliographie, ces deux sites sont cités: Digital Archive for the Study of pre-Islamic Arabian Inscriptions (DASI) et Online Corpus of the Inscriptions of Ancient North Arabia (OCIANA).

Partie I / chapitre 3 – Les vies de Mohammad (62 pages), par Stephen J. Shoemaker

D’entrée de jeu, l’auteur souligne l’absence généralisée de connaissances sur le personnage historique Mohammad. La première partie de l’étude porte sur les sources documentaires, soit les biographies traditionnelles musulmanes et le Coran. La seconde partie relate la quête du Mohammad historique sous ces thématiques: Vies politiques et économiques, Vies apologétiques et théologiques, Vies eschatologiques. Les analyses historico-critiques des ouvrages étudiés sont complétées par l’évocation de développements récents, dont la diffusion de ces sites: International Qur’anic Studies Association (IQSA), Mizan, et Early Islamic Studies Seminar (EISS).

Partie II / chapitre 8 – Le christianisme éthiopien (33 pages), Manfred Kropp et Guillaume Dye

L’importance de l’histoire éthiopienne pour comprendre l’émergence de l’islam est soulignée dans l’introduction. L’exposé se déroule ensuite en trois étapes: les origines du christianisme en Éthiopie, la description des particularités de ce christianisme, puis l’influence de ce christianisme sur le Coran.

Partie III / chapitre 16 – L’étude des manuscrits coraniques en Occident (11 pages), François Déroche

L’auteur présente les manuscrits coraniques en Occident depuis le 18e siècle. Il s’attarde ensuite aux représentants de « l’école hypercritique » des années 1970. Des informations et analyses supplémentaires sur ces données générales peuvent être lues sur la Toile: La voix et le calame. Les chemins de la canonisation du Coran (François Déroche, leçon inaugurale prononcée 2 avril 2015 au Collège de France).

Partie III / chapitre 17 – Les manuscrits coraniques anciens (43 pages), Éléonore Cellard

Dans son introduction, l’auteure note que la connaissance actuelle des manuscrits coraniques des premiers siècles de l’islam est très fragmentaire. Un grand nombre de ces témoins de l’histoire du Coran sont éparpillés, non catalogués ou inaccessibles. La première partie de son essai porte sur l’inventaire des fonds et l’histoire des collections, plus notamment sur les collections de quatre mosquées (Fustat, Kairouan, Damas, Sanaa). Dans ce contexte, les projets suivants sont présentés: Paleocoran, Coranica et Ircica. Dans la seconde partie, Éléonore Cellard présente quatre outils d’analyse pour reconstruire l’histoire de la transmission manuscrite du Coran: la chronologie absolue, la paléographie, la codicologie et la philologie. Les explications sont illustrées par de nombreuses figures.

Actualité

L’actualité du Coran est ainsi soulignée par les directeurs de la publication: « Ces dernières années, pas un mois, voire pas une semaine, ne se passe sans que paraisse une publication sur le Coran. »

Référence

Amir-Moezzi, Mohammad Ali; Dye, Guillaume; dir. - Histoire du Coran. Contexte, origine, rédaction. - Paris: Les Éditions du Cerf, 2022. - 1092p. - ISBN 978-2-204-15222-8. - [Citations: Introduction générale, 27, 28, 19, 30-31, 27]. - BAnQ : 297.122 H67322 2022.

Articles connexes

Traduction et étude du Coran
Nous n’avons jamais lu le Coran
Histoire du droit islamique
La grande mosquée de Damas
Grande mosquée des Omeyyades
Mosquée al-Haram de La Mecque