16 avril 2025

Les aventures naturalistes de Joseph de Jussieu


Héliotrope arborescent (Heliotropium arborescens, Boraginaceae) – «Cette plante, qui fleurit aujourd’hui dans une multitude de jardins de par le monde, est certainement le legs le plus visible du botaniste.»

Dans son livre intitulé Les conquistadors du savoir, Bernard Jimenez consacre un chapitre au botaniste Joseph de Jussieu (1704-1779), sous le titre Les aventures naturalistes de Joseph de Jussieu.

L’auteur aborde l’œuvre du botaniste en deux parties. Son récit est largement illustré par des documents de première source (dessins, cartes), des peintures artistiques et des photos contemporaines (plantes, paysages).

Première partie – Histoire naturelle et médecine, 1736-1747

[ 1 ] – Les trésors végétaux de « l’avenue des volcans » (1736-1739) – Les découvertes botaniques de Jussieu dans les environs de Quito : Duranta triacantha, Calceolaria crenata, Tigrida pavonia, Heliotropium arborescens, Cactus cylindrus, Chiquiraga jussieui, Lupinus alopecuroides, Azorella compacta. Ces espèces sont illustrées (5 dessins de Jussieu et 3 photos contemporaines).

[ 2 ] – Quinquina, l’or amer des Indes (1737-1739) – L’usage de l’écorce réduite en poudre de l’arbre Quiquina est répandu en Europe au 17e siècle. Mais c’est Joseph de Jussieu qui saura l’identifié précisément, sous sept espèces, dans la région de Loja. Ce n’est qu’en 1936 que son mémoire le décrivant sera publié. Des illustrations du Cinchona officinalis de Jussieu et/ou Morainville accompagnent le récit.

[ 3 ] – Malade, séquestré, puis médecin pour survivre (1739-1747) – Le contexte général (contrebandiers anglais et guerre de Succession d’Autriche) et local (fièvres à répétition, sans nouvelle de ses frères, manque d’argent, épidémie à Quito, contraint de rester sur place pour exercer la médecine, nuages de cendres causés par l’éruption du volcan Cotopaxi en 1744, intempéries) empêche Jussieu de regagner la France.

Seconde partie – L’exploration botanique des Andes et de l’Oriente, 1747-1758

[ 4 ] – À la recherche de la mythique cannelle (décembre 1747-avril 1748) – Les péripéties de l’expédition à la recherche de l’arbre à cannelle sont relatées avec minutie. Mais l’espèce Borbinia peruviana (Ocotea quixos) découverte et décrite par Jussieu n’a pas les qualités de l’espèce Cinnamomum verum (Ceylan, Sri Lanka). Plusieurs dessins de Jussieu et photos contemporaines accompagnent le récit.

[ 5 ] – Le voyage à Lima, avril-septembre 1748 – Jussieu illustre le cactus Cleistocactus neorezlii au cours de son périple et dessine trois oiseaux de Lima ou des environs. Il accepte de retourner en France par Buenos Aires, en compagne de Louis Godin.

[ 6 ] – Dans la vallée sacrée des Incas, septembre 1748-juin 1749 – Après 13 ans écoulés depuis son départ de La Rochelle, et de nombreuses fièvres, Jussieu entreprend avec enthousiasme la prochaine étape de son voyage de retour. De Lima au lac Titicaca, il herborise; par exemple : Passiflora edulis, Annona cherimola, Cantua buxifolia, Allionia incarnata, Crytopetalon ciliare, Ayenia pusilla, Opuntia soehrensii, Tropaeolum oerigrinum, Ullucus tuberosus. En cours de route, il visite plusieurs mines. Plusieurs dessins de Jussieu et des photos contemporaines.

[ 7 ] – Du lac Titicaca aux Yungas, juin-juillet 1749 – Dans ces régions, Jussieu s’attarde pour découvrir et décrire de nouvelles plantes : Buddleja incana, Escobedia scabrifolia, Erythroxylum coca. Trois dessins de Jussieu.

[ 8 ] – L’exploration botanique de l’Oriente, avril 1749-juillet 1750 – Dans la région de Santa Cruz de la Sierra et les missions jésuites de Chiquitos, le botaniste herborise de nouveau : Ficus boliviana, Guapurium peruvianum, Passiflora tomentosa, Garcinia madruno. Cartes dressées et plantes dessinées par Jussieu.

[ 9 ] – Ingénieur à Potosi, autonome 1750-décembre 1755 – Lors de son long séjour à Potosi, Jussieu exerce ses talents d’ingénieur, en particulier pour l’amélioration du fonctionnement d’un moulin à aubes et la reconstruction d’un pont important sur la rivière Pilcomayo. En route vers Lima, pour son retour en Europe avec le gouverneur Domingo de Jàuregui, Jussieur poursuit ses travaux botaniques : Neowerdermannia vorwerkii, Mimosa strombufira. Des dessins techniques et botaniques de Jussieu accompagnent l’exposé.

[ 10 ] – La triste fin d’un chasseur de plantes, janvier 1756-avril 1779 – Après un séjour de 20 ans en Amérique latine, Jussieu retourne à Lima. Il apprend alors le décès de sa mère et de plusieurs de ses frères et la perte de ses envois de plantes. À défaut de pouvoir herboriser, suite à sa maladie pulmonaire attrapée à Potosi, il exerce la médecine, souvent gratuitement pour les pauvres. Il rentre finalement en France en 1771, mentalement malade, après 35 ans d’absence.

Bernard Jimenez témoigne ainsi de la fin de Jussieu : «Sa fin de vie est un martyre. Paralysé, aveugle, Joseph meurt de la gangrène après huit jours de terribles souffrances, le 11 avril 1779, à l’âge de 74 ans.»

Témoignage de Nicolas de Condorset (1743-1794) envers Joseph de Jussieu : une «figure tragique de l’histoire des sciences».

De son œuvre immense ayant survécu, une centaine de dessins et quelque 400 planches d’herbier, Jussieu laisse aussi le souvenir de son humanisme envers les plus pauvres.

Référence

Jimenez, Bernard. – Les conquistadors du savoir. Une fabuleuse épopée scientifique en Amérique du Sud, 1735-1743. – Préface de Christian Grataloup. – Paris : Glénat / La Société de géographie, 2024. – 192 p. – ISBN 978-2-344-058275. – Chapitre 4 : Les aventures naturalistes de Joseph de Jussieu, p. 102-139. – [Citations : p. 103, 137, 139]. – Bibliothèques de Montréal et BAnQ : 508.8 J614c 2024.

Image

Héliotrope arborescent (Heliotropium arborescens, Boraginaceae) © Claude Trudel, Le monde en images, CCDMD. – Photo affichée dans l’album Plantes en Amérique latine et aux Antilles (2025), p. 67.

Articles connexes

La Condamine en Amérique du Sud
La mesure du Nouveau Monde

09 avril 2025

L’Univers violent / Kumiko Kotera


Nous savons aujourd’hui que l’Univers est peuplé d’une grande diversité d’astres joyeux qui pulsent, explosent, jaillissent, pétillent, et brillent de toutes les couleurs. Ils nous offrent leur fabuleuse énergie non seulement sous forme de lumière, mais aussi en nous envoyant d’autres messagers tangibles : des particules de matière et des ondes déformant la toile de l’espace-temps – de quoi vivre le cinéma de l’Univers violent comme une expérience multisensorielle.

L’astrophysicienne Kumiko Kotera, directrice de l’Institut d’astrophysique de Paris (IAP), nous invite à explorer les récentes découvertes de sursauts lumineux dans l’Univers. Son livre compte quatorze chapitres.

[ 1 ] – Son et lumière – Le chapitre initial relate les péripéties époustouflantes de la détection fortuite de GW170817, le 17 août 2017 à 12 heures 41 minutes 4 secondes UTC. Cette détection de la fusion de deux étoiles à neutrons au sein de la galaxie NGC 4993, tant sous forme d'ondes gravitationnelles que sous forme lumineuse, marque le début de l’ère de la nouvelle astronomie multimessager. Cet événement est illustré sur l’image ci-dessus.

[ 2 ] – Invitation au voyage cosmique – Le chapitre porte sur la sonde Voyager I, les notions de champ magnétique et de plasma, les mesures de distance (année-lumière, parsec, kiloparsec, mégaparsec, gigaparsec; parallaxe), et les grands ensembles cosmiques (Système solaire, Voie lactée, Groupe local, Superamas local, filaments).

[ 3 ] – Une année dans l’Univers violent – Le voyage se déroule dans une boîte cubique de 300 mégaparsecs de côté [Univers local]. Plusieurs événements tumultueux surgissent au fil du temps : supernovae, pulsar, naines blanches, kilonova, disruption par effets de marée d’une étoile à proximité d’un trou noir, sursaut de blazar, trous noirs en coalescence, sursaut gamma. – Citation : «À chaque seconde de votre vie sur Terre, 50 à 100 mille milliards de neutrinos produits par le Soleil sillonnent votre corps, indifférents.»

[ 4 ] – Au cinéma de l’Univers – Le chapitre porte principalement sur le déroulement en plusieurs séquences d’une observation de la Nébuleuse du Crabe avec le télescope 120 de l’Observatoire de Haute-Provence. Plus sommairement sont présentés les observatoires Palomar (1928) et Vera Rubin (2027), ainsi que d’autres programmes d’observation du ciel transitoire. – Citation : «Le défi de nos jours est d’être capable d’effectuer le tri entre les alertes utiles ou non, à distribuer ou non dans le monde entier.»

[ 5 ] – Il pleut des particules – Dans une perspective historique, le chapitre porte sur l’origine et de la nature des rayons cosmiques d’ultrahaute énergie. L’auteure aborde aussi le choix de son sujet de thèse et ses rencontres avec James Cronin, prix Nobel de physique 1980.

[ 6 ] – L’Odyssée du ciel violent – Le destin des étoiles est fonction de leur masse : Soleil (→ naine blanche); étoile ayant 8 fois la masse du Soleil (→ géante rouge → étoile à neutrons); étoile ayant 30 à 40 fois la masse solaire (→ trou noir stellaire). Au cours du chapitre, la vie de Subrahmanyan Chandrasekhar est esquissée et sa contribution déterminante à la physique est soulignée : la masse de Chandrasekhar.

[ 7 ] – La mort des titans – Le sort des étoiles à neutrons est détaillé, dont l’éjecta de la supernovae et la formation des éléments lourds. Les phénomènes étudiés sont expliqués sous la forme d’une chevauchée fantastique d’un rayon cosmique.

[ 8 ] – La naissance des puissances – À Chicago, avec la chercheuse Angela Olinto, l’auteure effectue des recherches pour démontrer que les pulsars (des étoiles à neutrons pêchues) seraient les sources des particules les plus énergétiques connues. Elle commente ainsi l’aboutissement de ses calculs : «Avec les pulsars, j’ai appris l’émotion de la théorie qui tombe juste. Nantie d’un tel résultat, j’ai pu parcourir le monde et donner des présentations exaltées.»

[ 9 ] – Sursauts dansants – L’auteure et deux de ses collègues s’attardent sur l’aspect multimessager des sursauts gamma. À cette fin, la métaphore du couple de danseurs Lisa et Gwen, ainsi que l’observation d’une foule de piétons, est évoquée.

[ 10 ] – D’un bouclier noir aux horizons lumineux – Dans son récit menant à l’image du trou noir supermassif Sagittarius A*de la Voie lactée et de son horizon des événements, l’auteur explique les spéculations, les hypothèses et les découvertes des savants Karl Schwarzchild, Albert Einstein, Reinhard Genzel et Andrea M. Ghez.

[ 11 ] – La ballade de Lisa et Gwen – S’inspirant du roman Le Rivage des Syrtes, de Julien Gracq, l’auteure relate les prémisses théoriques et technologiques menant à la première détection des ondes gravitationnelles, le 14 septembre 2015 : GW150914. «Il s’agissait de l’explosion la plus énergétique jamais observée sur terre.»

[ 12 ] – Vous reprendrez bien un peu de neutrinos ? – Le chapitre porte sur la récupération de neutrinos de très haute énergie, la naissance de l’astrophysique des neutrinos, les expériences IceCube, Antares et KM3Net. La dernière partie aborde les prémisses du projet GRAND pour détecter des neutrinos de très haute énergie dans le désert de Gobi.

[ 13 ] – Du sable et de l’acier – C’est la description minutieuse du projet GRAND dédié à la radiodétection des astroparticules, en particulier l’installation d’antennes dans le désert de Gobi (Chine), à Malargüe (Argentine) et à Nançay (France). Les péripéties se déroulent sur une dizaine d’années (2014-2023).

[ 14 ] – Les grands rêves – L’exposé se termine en apothéose : la détection de neutrinos d’ultrahaute énergie et d’ondes gravitationnelles consécutive à une supernovae surgit de la galaxie Andromède, le 9 mai 2031 à 13 heures 03 minutes 17 secondes…

Appréciation

Un exposé de vulgarisation scientifique fascinant, agrémenté d’anecdotes personnelles, familiales, amicales et professionnelles. L’écriture est rythmée, dynamique, rayonnante d’ultrahaute énergie.

Référence

Kotera, Kumiko. – L’Univers violent. – Paris : Albin Michel, 2025. – 297 p. – ISBN 978-2-226-49714-7. – [Citations : p. 10, 59, 90, 151, 163, 229-230]. – BAnQ : 522.6862 K872u 2024.

Image

GW170817 : un événement astronomique mondial © El Sol Newspaper / GW170817: un evento astronómico global – Permitida su reproducción total o parcial citando la fuente [La reproduction totale ou partielle est autorisée avec citation de la source.]

Vidéos

GW170817 – LIGO Laboratory / California Institute of Technology (Caltech)

Livre numérique

Astronomie et astrophysique (répertoire de sites et recueil de recensions)

Sur la Toile

Projet GRAND (Giant Radio Array for Neutrino Detection)
Télescope de 120 cm (Observatoire de Haute-Provence)

16 mars 2025

Rosier hybride de thé


Rosa ‘La Perla’, Rosaceae
Origine horticole
Jardin botanique de Montréal.

Référence

Rosier hybride de thé (Hybrid Tea Rose) © 2024, Claude Trudel, Le monde en images, CCDMD.

Albums

Albums botaniques (Livres numériques gratuits).

Collection

La Collection de Claude Trudel compte plusieurs milliers de photos botaniques. Les photos peuvent être vues individuellement ou en diaporama. Elles peuvent aussi être envoyées au format carte postale virtuelle. Sous une licence CC BY-NC-SA, les photos peuvent être utilisées gratuitement à des fins éducatives non commerciales.

15 mars 2025

Un polar au cœur du Groenland


Il n’y a plus ni nord, ni sud, ni est, ni ouest.
Pas plus qu’il n’y a de soleil, de lune ou d’étoiles dans le ciel éteint.
Où que l’homme pose son regard, ne subsiste qu’un aplat uniforme et sans cap, d’un blanc bleuté par la nuit polaire.

Telles sont les premières phrases du roman policier de l’auteur Mo Malø intitulé Summit, du nom d’une station de recherche située à 3 216 mètres d’altitude, au Groenland.


Pour familiariser le lecteur francophone aux lieux géographiques et aux noms des personnages, une carte est insérée au début du livre et une liste des personnages figure à la fin de l’ouvrage.

Épigraphes : «Nous ne croyons pas. Nous avons peur.» (Propos du chamane Aua à Kurd Rasmussen); «Si tu as peur, change de chemin.» (Proverbe inuit)

Un prologue; trois parties regroupant les chapitres 1-12, 13-43, 44-53; un épilogue; les remerciements : voilà le plan du livre. Table des matières absente.


Prologue. Un individu, en provenance de Reykjavk, atterrit à Kangerlussuaq. Pour tuer le temps, il marche à peu de distance de l’aéroport. Puis il est assommé, dévalisé et transporté ailleurs dans un endroit isolé. À son réveil, un ours s’en approche… sur la page de couverture, le lecteur avait d’ailleurs observé son pelage blanc, son œil rouge et son nez noir.

Comme pour les parties suivantes, le titre de la première partie indique des températures : Température réelle – 16 °C et Température ressentie – 22 °C. Comme les autres chapitres, le chapitre initial est titré : Nuuk, rue Paarnarluit, chez Qaanaaq Adriensen – 1er février. Le lecteur apprend le nom du voyageur islandais, le motif de sa visite, et l’identité des membres de la famille du chef de la police groenlandaise, le protagoniste Qaanaaq Adriensen.

Le titre du chapitre 2 est identique au précédant. Par contre, les chapitres suivants, jusqu’au chapitre 6, sont insérés entre crochets et dénommés par un nom de fichier image. Par exemple : [IMG_0018.jpg / 1er février 2022 / 14 h 47  Hall de l’aéroport de Kangerlussuaq, buste de Knud Rasmussen] pour le chapitre 3. Ce titre fait allusion à la photo prise par Qaanaaq Adriensen d’un buste en bronze du mythique explorateur de l’Arctique.

Les péripéties des huit premiers chapitres se déroulent le 1er février, les suivants le lendemain 3 février. Au cours de cette première partie, les événements évoqués sur la quatrième page de couverture du livre sont relatés d’une façon exhaustive. Le lecteur est déjà confronté à de multiples hypothèses sur l’enjeu de la trame romanesque.

Deuxième partie : Température réelle – 34°C et Température ressentie – 52°C. Les péripéties se déroulent au cours d’une dizaine de jours. Le 4 février : une brève excursion au large de la banquise de Daneborg et une tentative de meurtre (chapitres 13-17). Le 5 février : une conversation sur l’enquête du policier disparu (chapitre 18). La semaine du 7 au 14 février : une longue et haletante excursion sur l’inlandsis (chapitres 19-43).

Assurément le cœur du récit. Les rebondissements, les ruptures et les liaisons se bousculent, s’entremêlent, se brouillent et s’éclairent. L’environnement glacial et inhospitalier s’impose avec de plus en plus d’intensité, alors que les communications électroniques s’amenuisent ou s’interrompent. Le lecteur intensifie alors la cadence de sa lecture, suivant le rythme effréné des péripéties.

Troisième partie : Température réelle – 49°C et Température ressentie – 61°C. Suite chronologique : le 14 février (chapitre 44), le 15 février (chapitres 45-48), le 16 février (chapitres 49-52), puis le 21 février (chapitre 53). C’est le dénouement de plusieurs intrigues, d’une manière plus ou moins vraisemblable.


Remarque

Les vingt notes infrapaginales (p. 20, 26, 31, 33, 57, 70, 88, 122, 141, 158, 164, 207, 223, 255, 288, 299, 318, 361, 370, 373) référant aux romans antérieurs de la série Les enquêtes de Qaanaaq Adriensen sont superflues.

Référence

Malø, Mo. – Summit. – Paris : Éditions de la Martinière, 2022. – 395 p. – ISBN 978-2-7578-9890-1. – [Citation : p. 13]. – Bibliothèques de Montréal et BAnQ : MAL Mo su; Malo M2571s.

Image

Berge fluviale au printemps © Claude Trudel, Le monde en images, CCDMD.

Sur la Toile

Frédéric Mars (site de l’auteur)
Frédéric Mars [Mo Malø] – Wikipédia

Summit Camp ou Summit Station – Wikipédia
Summit Station, Greenland – National Science Foundation (NSF)

Critiques

Babelio
Sens critique

10 mars 2025

Les Assassins d’Alamût


Depuis de nombreuses années, voire quelques siècles, une minorité religieuse du Moyen-Orient focalise bon nombre de fantasmes, suscite les interprétations les plus contradictoires et les plus discutées, mais aussi les extravagantes. Il s’agit de la « secte des Assassins » dont le siège fut établi à Alamût en Perse (Iran).

L’historien français Yves Bomati présente une réinterprétation de l’histoire de l’Ordre des Assassins. Son livre, sous-titré Les dessous d’une politique de la terreur, compte une introduction, dix chapitres regroupés sous trois parties, une conclusion et plusieurs compléments. La Table des matières est insérée à la fin du livre.

S’agissant d’une étude historique, la lecture préalable de la conclusion et des compléments peut favoriser une meilleure compréhension de l’étude (86 pages) : Notes, Glossaire, Chronologies des grandes puissances au Moyen-Orient (10e-13e siècle), Chronologie générale, Bibliographie sélective (sources premières et secondaires), Index des noms, Index des lieux, Cartes. Celles-ci sont insérées respectivement au début de chaque partie : Le Moyen-Orient, 7e-12e siècle; Villes principales et forteresses autour d’Alamût en Iran et en Syrie, 11e-13e siècle; Les États latins d’Orient et leurs voisins au 12e siècle.

Introduction

L’auteur fait le point sur la réputation péjorative de la « communauté ismaélienne nizârite ». Il évoque ensuite les sources documentaires et souligne le contexte historique des grands bouleversements au Moyen-Orient : les incendies des bibliothèques ismaéliennes par les Mongols; les empires musulmans successifs, les conquêtes mongoles, les Croisades européennes; les querelles religieuses au sein du monde islamique. Enfin, il précise son double objectif : rouvrir le débat pour en finir avec les affabulations séculaires sur les ismaéliens nizârites; réfléchir sur l’adaptation de l’Islam orthodoxe à la modernité.

Partie I – De la légende à la réalité

Dans le chapitre initial, l’auteur fait le point sur la légende noire des Assassins, en particulier sur Le livre des merveilles de Marco Polo qui en est en quelque sorte l’origine. Plusieurs pages sont ainsi consacrées à l’historiographie pour dégager la réalité de la légende.

Le deuxième chapitre est consacré au contexte historique et religieux en Iran après le traumatisme de l’invasion arabe (651). Notons quelques faits saillants de ces siècles tourmentés. L’assassinat d’Ali en 661 et le débat sur sa succession provoquent un schisme en terre d’Islam : les chiites se séparent des sunnites et se réfugient en Iran. Un nouveau débat sur la succession de l’Iman, successeur du Prophète, surgit chez les chiites. Une minorité de ceux-ci, désignés sous le nom d’ismaéliens, entrèrent dès lors dans la clandestinité. Après moult péripéties, un califat ismaélien chiite est fondé en Afrique du Nord au début du 10e siècle. Son influence rayonna jusqu’en Afghanistan et en Inde. Mais cet empire allait devoir affronter rapidement les Turcs seldjoukides, nouvellement convertis à l’Islam sunnite.

Le troisième chapitre porte sur Hasan Sabbah, figure montante des ismaéliens nizârites. L’auteur fait le portrait du jeune perse, en notant ses talents et sa brillante formation intellectuelle. Né en 1052 dans une famille chiite duodécimaine de Qom, il se convertit à l’ismaélisme à l’âge de 17 ans. En 1078, il se rend en Égypte pour parfaire son initiation. Son activisme pour la légitimité du pouvoir politique et un retour à l’orthodoxie ismaélienne lui valent le bannissement en 1080. De retour en Iran, il consolide ses relations, soutient l’opposition à l’occupation étrangère turque et répand son interprétation du Coran. En 1090, il prend le contrôle du fort d’Alamût.

Partie II – Hasan Sabbah (1090-1124), le Grand Maître des Assassins

Le quatrième chapitre explique les avantages stratégiques et l’importance du site d’Alamût acquis par Hasan Sabbah en 1090. La montée en puissance du jeune Maître est ensuite relatée dans le contexte du déclin des Abbassides et de la lutte contre les Turcs seldjoukides. La guerre de succession survenue en Égypte entraîne un nouveau schisme dans la communauté ismaélienne. Hasan Sabbah rompt avec les Fatimides égyptiens et fonde l’ismaélisme nizârite en 1097.

Le cinquième chapitre débute par une longue explication de la « Nouvelle Prédication » de l’ismaélisme nizârite. L’initiation à cette doctrine, gardée largement secrète jusqu’à nos jours, fait l’objet de longues présomptions. Hasan Sabbah apporte des évolutions et éclaircissements à la doctrine qui lui assure sa légitimité et son immense pourvoir sur la communauté, sans qu’il prétendre au titre d’iman. Les parties suivantes illustrent son emprise : « À l’évidence, Hasan, exerçant un ascendant quasi hypnotique sur sa communauté, régna sans doute par son charisme, ses qualités intellectuelles et son ascétisme, mais aussi par son idéologie de combat appuyé par la terreur. » Les assassinats ciblés, en majorité contre des dirigeants arabes et turcs, en témoignent. Le chapitre est complété par un exposé sur l’efficace réseau de communication de Sabbah et ses nombreuses forteresses, notamment celles de Syrie où les Croisés commençaient à s’installer.

Le bref sixième chapitre porte sur l’héritage d’Hasan Sabbah décédé le 12 juin 1124. L’auteur trace son portrait, établit le bilan de ses réalisations et souligne sa réputation pérenne.

Partie III – Les héritiers de Hasan Sabbah (1124-1221) et la Grande Résurrection

Le s deux successeurs d’Hasan Sabbah font l’objet du septième chapitre : Kiyâ Buzurg-Ummîd (1124-1138) et son fils Muhammad d. Buzurg-Ummîd (1138-1162). Ceux-ci poursuivent la politique du fondateur de l’ismaélisme d’Alamût, combattent les Abbassides et les Seldjoukides (plusieurs guerres et assassinats politiques), composent occasionnellement avec Croisées et entendent leur empire.

Le chapitre huit est consacré à Hasan ibd Muhammad d. Buzurg-Ummîd, dit Hasan II (1126-1166) qui, niant être le fils de Muhammad d. Buzurg-Ummîd et affirmant une ascendance fatimide, se proclame calife et iman le 8 août 1164, lors de la proclamation de la Grande Résurrection. L’auteur présente les conséquences de cette révolution politique et religieuse. Son fils, Nur-al-Dîn Muhammad II b. Hasan, assume la succession jusqu’à sa mort en 1210. Son fils Jalâl al-Dîn Hasan III lui succède jusqu’en 1221.

Le chapitre neuf porte sur Râshid al-Dîn Sinân (1126/1135-1193) et son ascendance en Syrie. L’auteur raconte les nombreuses péripéties et les nombreuses meurtrières entre les puissances de l’époque, y compris la prise du pouvoir en Égypte par Saladin, fondateur de la dynastie des Ayyoubides en 1171. Les combats et tactiques de la terreur de Sînan contre les Seldjoukides et Saladin sont relatés, renforçant la réputation péjorative des Assassins pour la suite des temps. Face aux chrétiens, l’affaire Conrad de Montferrat, dans le contexte des États latins, est longuement abordée (plus de sept pages).

Le chapitre 10 porte sur les derniers imans nizârites et la destruction d’Alamût par les Mongols, en 1256. L’auteur brosse un tableau de la situation internationale après la mort de Sinân et de Saladin. Dans ce contexte, Jalal-al-Dîn Hasan III succède à son père comme sixième seigneur d’Alamût. Il rompt avec l’ismaélisme de l’Ordre des assassins et établit des relations pacifiques avec les sunnites et les Abbassides, puis tenta d’amadouer les Mongols. Son successeur ‘Alâ al-Dîn Muhammad III (1221-1255) poursuivit cette politique et Alamût devient un brillant foyer intellectuel accueillant Abbassides et sunnites. L’auteur s’attarde ensuite à la croisade du roi Louis IX. Le huitième et dernier iman d’Alamût, Rukn al-Dîn Kurshâh (1255-1257), après une résistance infructueuse, se rend aux conquérants mongols qui détruisent la forteresse et brûlent la riche bibliothèque d’Alamût.

Conclusion

Après avoir formulé une rétrospective de l’ismaélisme à l’époque du Moyen-Âge, l’auteur s’attarde à de longues considérations et spéculations sur l’Islam et ses orientations actuelles. À ce titre, son ouvrage s’avère plus idéologique qu’historique.

Référence

Bomati, Yves. – Les Assassins d’Alamût. Les dessous d’une politique de la terreur. – Paris : Armand Collin, 2024. – 285 p. – ISBN 978-2-2006-3742-2. – [Citations : p. 9, 91]. – BAnQ : 956.014 B695a 2024.

Image

Basawan (v. 1560-1600), designer; Nanda Gwaliori, coloriste. – Forteresse des Assassins d’Alamut. Miniature persane, vers 1596. – Page d’un manuscrit Chinghiz-nama : Hulagu Khan détruit le fort d’Alamut (titre principal). – Wikipédia.

Cette œuvre est reproduite, en partie, sur la page de couverture du livre Les Assassins d’Alamût.

Encyclopédies

Hasan Sabbah (Encyclopaedia Iranica) – Farhad Daftary, “ḤASAN ṢABBĀḤ,” Encyclopaedia Iranica, XII/1, pp. 34-37, 2012.

BAnQ offre à ses abonnés la consultation en ligne de plusieurs encyclopédies sur l’Islam, en anglais, dont celles-ci :

Encyclopedia of Islam and the Muslim world / Martin, Richard C. éditeur intellectuel / Second edition / Farmington Hills, MI : Gale, Cengage Learning, 2016.

The Oxford encyclopedia of Islam and politics / edited by Emad El-Din Shahin / [Oxford] : Oxford University Press, 2014.

The Oxford encyclopedia of philosophy, science and technology in Islam / Ibrahim Kalin, editor in chief / Oxford : Oxford University Press, 2014.

The Princeton encyclopedia of Islamic political thought / Böwering, Gerhard, 1939- éditeur intellectuel, Crone, Patricia, 1945-2015 éditeur intellectuel, Mirza, Mahan éditeur intellectuel, Gale Group / Princeton, N.J. : Princeton University Press, c2013.

et cette encyclopédie imprimée, en français :

Encyclopédie de l’Islam / Nouv. éd. / établie avec le concours des principaux orientalistes par un comité de rédaction composé de B. Lewis, Ch. Pellat et J. Schacht...; sous le patronage de l’Union académique internationale / Paris : G.P. Maisonneuve, 1960-

Outre ces encyclopédies, la Grande Bibliothèque contient plusieurs monographies sur les Assassin et plus encore sur l’Islam et les musulmans.

Articles connexes

Traduction et étude du Coran
Nous n’avons jamais lu le Coran
L’Iran : des Perses à nos jours
Le crédo des Assassins
Histoire du Coran

27 février 2025

Pour comprendre l’actualité

À titre indicatif, trois chroniques parues récemment dans le journal Le Devoir permettent d’envisager trois visions, trois interprétations, trois approches historiques pour appréhender l’actualité : à court terme, à moyen terme et à long terme.

Pour comprendre l’actualité

1° histoire événementielle (quelques années, période interélectorale, micropolitique; groupe)

Michel David, Une autre guerre, 25 février 2025

Citation : «Ce conflit [grève des enseignants] a indéniablement causé de sérieux inconvénients aux élèves et aux parents, mais « la sécurité sociale, économique ou environnementale de la population » est une notion passablement élastique. Un gouvernement peut facilement la confondre avec sa propre sécurité politique. […] L’un ou l’autre [PLQ ou PQ] pourrait bien se trouver au gouvernement lors des prochaines négociations dans le secteur public et serait sans doute bien aise de pouvoir invoquer le « bien-être de la population.»

2° histoire socio-économique (une trentaine d’années, période d’une génération; société)

Camille Robert, Que reste-t-il de l’État-providence?, 21 février 2025

Citation : «Pour les personnes ayant vécu dans les années 1980 ou celles, comme moi, qui s’y sont intéressées dans le cadre de recherches historiques, les événements récents évoquent une sensation de déjà-vu. […] Sans aller aussi loin que les États-Unis, le gouvernement québécois s’est également engagé dans la voie du néolibéralisme dès le tournant des années 1980.»

3° histoire séculaire (plusieurs siècles, nature humaine; humanité)

Jean-François Nadeau, La torche à la main, 24 février 2025

Citation : «Les classes dominantes, tout au long de l’histoire, ont toujours voulu et considéré comme un dû le fait d’obtenir plus de pouvoir, plus de contrôle, plus de richesse. Si leurs moyens ont changé, l’objectif demeure le même.»

À titre d'exemple, trois visions, interprétations et approches différentes envisagées pour analyser et commenter l’actualité. Chacune a ses mérites et ses limites, d’où l’intérêt de considérer une variété de sources pour appréhender le monde actuel.

Référence

Le journal Le Devoir peut-être consulté dans des bibliothèques publiques et BAnQ offre gratuitement la consultation en ligne d'une version numérique du journal à ses abonnés.

Image

Belvédère Léo-Ayotte © 2007, Claude Trudel, Le monde en images, CCDMD.

16 février 2025

Montréal au milieu du 19e siècle / Pierre-Louis Morin

Une description de Montréal au milieu du 19e siècle est présentée sur cette carte composite dressée par Pierre-Louis Morin (1811-1886) : Carte d’un Voyage de Paris à Montréal. Ce document cartographique est affiché sur le site BnF/Gallica, depuis le 9 février 2025.


Description de Montréal

« Montréal, sur la côte méridionale de l’île de Montréal, au pied d’une petite montagne qui lui a valu son nom, est la ville la plus riche et la plus peuplée de l’Amérique Anglaise, le principal dépôt des marchandises importées de la Grande Bretagne, le centre du commerce intérieur des Canada. Ces avantages, elle les doit à la facilité des communications avec le lac Ontario, l’Outaouais, le lac Champlain et toutes les parties d’un grand et fertile district agricole – plus encore, peut-être, au zèle et à l’activité de ses citoyens et au progrès toujours croissants de son industrie. Il y a une foule de puissantes compagnies commerciales et de fondations charitables, des Sociétés de littérature, d’histoire naturelle, d’agriculture, d’arts mécaniques, d’éducation, etc. Les édifices publics, les quais, l’entrée du beau canal de la chine et la plupart des maisons, sont en pierres de taille tirées des superbes carrières de la montagne.

Les principaux édifices publics sont l’Église paroissiale Notre-Dame, la plus grande qui existe en deçà du Mexique, longueur 256 pieds, largeur 133 et la hauteur des tours 202 pieds, La vaste et belle église de St.Patrice, la Halle du marché Bonsecours le plus vaste et le plus bel édifice, dans son genre, qu’il y ait en Amérique, le nouveau palais de Justice, le Grand Séminaire St.Sulpice, la banque de Montréal, celle de la Cité et celle de l’Amér.-Brit. du Nord, l’école des frères de la Doctrine Chrétienne, etc.

12 bateaux à vapeur, Diligences, Omnibus, éclairage au gaz, télégraphe électrique qui communique avec toutes les Villes du Canada, et des États-Unis – Population en 1850 52,000 habitants, dont 20,000 d’origine Française, 12,500 Irlandais, 9,000 Anglais, 6,000 Écossais, et le reste Allemands Américains etc. etc. – 34,000 catholiques – »

Remarque

Datant de 1836-1837 ou du milieu du 19e siècle, des données statistiques et des descriptions de plusieurs autres régions et lieux font l’objet de nombreuses observations. Le phénomène des aurores boréales fait l’objet d’une explication distincte. Une note manuscrite de George Simpson, gouverneur de la Compagnie de la Baie d’Hudson (1821-1860), atteste que Pierre-Louis Morin a effectivement fait un voyage dans les Prairies (Manitoba) au cours de l’hiver 1836-1837.

Source

Carte d’un Voyage de Paris à Montréal (1851) dressée par Pierre-Louis Morin. – BnF/Gallica.

Complément

Environs de Montréal (1864) : l’analyse de cette carte dressée par Pierre-Louis Morin est présentée dans l’Atlas du Québec en Amérique et du monde.

Biographies et autres documents

L'artiste québécois méconnu Pierre-Louis Morin, 1811-1886 (Robert Derome).
Morin, Pierre Louis (Biographical Dictionary of Archtects in Canada, 1800-1950).
Pierre-Louis Morin (1811-1886), créateur d'images archéologiques mythiques (Robert Derome).
Pierre-Louis Morin (Wikipédia).

Collection Pierre-Louis Morin [documents textuels, dessins, gravures] – (BAC)
Mémoire faisant état du coût d'un voyage en France et des travaux faits à Paris pour la bibliothèque de la Chambre d'assemblée du Bas-Canada, 14 juin 1853 – BAnQ.
Pierre Louis Morin (1811-1886) – BnF.
Le véritable plan de Québec fait en 1663 [document cartographique] Jean Bourdon [Pierre-Louis Morin]. – BAC.

George Simpson – John S. Galbraith (Dictionnaire biographique du Canada).

06 février 2025

On tue… / Jean-Jacques Pelletier


Dédicace : « À tout ce qui s’efforce de survire… »

Comme dans ses polars précédents, Jean-Jacques Pelletier situe son récit dans le contexte de la société actuelle et celui des technologies contemporaines. La structure du roman On tue... est canonique, avec des épisodes numérotés en continu : un prologue; deux parties, la première subdivisée en trois chapitres, la seconde subdivisée en quatre chapitres; un épilogue. Cette construction explicite est présentée dans la Table des matières, au début du livre.

Un Avertissement au lecteur et quatre citations (de Lili Graves, Romain Gary, The Sex Pistols et William Shakespeare) sont insérés entre la Table des matières et le Prologue. Les Personnages principaux et secondaires, les Remerciements et une notice biographique de l’auteur sont affichés à la fin du livre.

Prologue

C’est bien connu, l’écrivain québécois ne fait pas dans la dentelle. Ainsi en va-t-il dès les épisodes 1 à 7 du Prologue. Sur la Toile, des vidéos d’un adolescent agonisant sont diffusés pendant plusieurs jours. Averti par texto, le père de la victime découvre le cadavre de son fils dans un appartement de la Petite-Bourgogne. Au cours de l’interrogatoire d’un suspect, une altercation surgit entre celui-ci et le père du jeune assassiné.

Alors que le Prologue est daté de 2017, les événements des parties suivantes se déroulent en 2019 : Cruautés éparpillées, Les meurtres pédagogiques.

Première partie / Cruautés éparpillées

Dans le chapitre initial, intitulé L’élevage des vieux, le titre du roman et celui du chapitre sont contextualisés. Au cours des 8 à 53 épisodes, le lecteur découvre l’équipe d’enquêteurs affectée à élucider plusieurs meurtres survenus à Verdun. D’un épisode à l’autre, l’intrigue se complexifie. Par ailleurs, plusieurs épisodes ont trait à la politisation de l’enquête, à une intervention diplomatique énigmatique et à des contrats commandités par des personnages anonymes. Les dialogues sont prédominants, ce qui rend l’écriture dynamique. La typographie est variée : récit continu, monologues intérieurs, manuscrits, textos, émissions télévisées, billets de réseaux sociaux.

Amorcé en quelque sorte dans l’épisode 48, le chapitre L’abattoir est beaucoup plus court. Il comprend les épisodes 54 à 79 centrés sur une carcasse humaine découverte dans la chambre froide d’une boucherie de Montréal-Nord. En parallèle, de nouvelles révélations concernent les meurtres antérieurs survenus à Verdun. Un incident dramatique impliquant le protagoniste surgit au cours des enquêtes criminelles. Comme au chapitre précédent, et concernant le même personnage, le lecteur peut déceler quelques incongruités dans le récit. Par ailleurs, dans le dernier épisode, l’instigateur des meurtres indique son but et évoque les phases de son plan correspondant aux titres des deux parties du roman.

Le cobaye humain, tel est le titre du troisième chapitre dans lequel se déroulent les épisodes 80 à 120. Le premier épisode se déroule au cimetière Mont-Royal : des individus déterrent un cercueil et lui substituent une carcasse de porc. Puis le seul survivant des victimes de Verdun est assassiné dans son lit d’hôpital. Puis une nouvelle victime est trouvée dans un condo de Griffintown. Puis un meurtre est commis dans un restaurant. Les enquêtes policières, comme les interventions politiques, s’imbriquent. Les indices sur les possibles motifs des crimes se précisent, mais ils restent diffus. En fin de chapitre, le lecteur prend connaissance du manifeste (en cours de rédaction) de l’instigateur des assassinats.

Deuxième partie / Les meurtres pédagogiques

Un chasseur est trouvé décapité dans son immense résidence située sur le flanc du mont Royal. À juste titre, le quatrième chapitre s’intitule Le trophée de chasse. C’est le début d’une nouvelle enquête qui se déroule au cours des épisodes 121 à 174. D’une façon fracassante, les photos des victimes antérieures et le manifeste sont diffusés par un quotidien montréalais. Par ailleurs, le lecteur découvre encore de nouveaux personnages, en plus de l’identité du mercenaire au service de l’instigateur des meurtres. Aussi, trois autres meurtres, dont le dernier a de fortes implications politiques.

Les épisodes 175 à 220 sont relatés au long du chapitre Gaver ou être gavé. De nouvelles scènes de crime, tout aussi sanguinaires, sont découvertes à l’extérieur de la métropole, à Drummondville et Sherbrooke, en relation avec l’élevage industriel des porcs et des poulets. Sur ces nouveaux meurtres et les précédents, les enquêtes progressent. Des suspects, commanditaires et exécutants, sont identifiés et le lecteur en apprend davantage que les policiers sur le ou les instigateurs des assassinats. La prochaine leçon est annoncée à la fin du chapitre.

Des cadavres commis à Rimouski et Gatineau, meurtris d’une façon aussi ahurissante que les précédents, font l’objet du chapitre Trafic d’espèces menacées, comprenant les épisodes 221 à 247. Les rebondissements sont aussi multiples qu’étonnants. Par exemple, le lecteur prend connaissance de révélations sensationnelles sur plusieurs personnages principaux. Il peut dès lors anticiper la fin de l’histoire.

Tout aussi bref, le dernier chapitre comprend les épisodes 248 à 260 : La dernière leçon. Les ultimes assassinats projetés sont déjoués par les policiers, dans un contexte politique rendu avec beaucoup d’acuité.

Épilogue

Les derniers épisodes 261 à 269 donnent lieu à une rétrospective sur les événements et des propos sur la politique, la science, l’humanité, l’environnement et une potentielle suite de l’histoire.

Les derniers mots font échos à ceux de la Dédicace : « Vivre. Quoi d’autre ? »

Quelques citations

– Le premier ministre lui-même suit l’affaire de près. Il paraît qu’il est très sensible au sort des personnes âgées !
– Première nouvelle qu’il est sensible à quelque chose d’autre qu’à son image. Et accessoirement, à celle du parti…

À la radio, après la lecture du message, c’est maintenant le défilé des experts et des micros-trottoirs qui s’amorce.

Quand on regarde les caricatures de guerre, au cours de l’histoire, les ennemis sont toujours animalisés.

Avec l’argent, on peut s’acheter un gouvernement, ou même la présidence des États-Unis.

Sur la scène, le résultat de la loterie électorale de l’année précédente [2018] continue de rassurer ses électeurs potentiels.

Pages 055, 316, 442, 609 et 628.

Référence

Pelletier, Jean-Jacques. – On tue… – Lévis (Québec) : Les Éditions Alire, 2024 © 2019. – 655 p. – ISBN 978-2-8983-5056-6. – Bibliothèques de Montréal et BAnQ : PEL Jea on ; Pelletier P3885o.

Image

Centre-ville de Montréal © Claude Trudel, 2019, Le monde en images, CCDMD.

Au centre de la photo : le 1000 De La Gauchetière. À droite : la tour de la Bourse. – Photo prise à proximité de la galerie 1700 La Poste située à l’angle des rues Notre-Dame Ouest et Guy, dans le quartier Petite-Bourgogne.

22 janvier 2025

Ouragans tropicaux / Leonardo Padura


C’est comme les ouragans tropicaux : ils passent, ils font un max de dégâts et puis ils s’en vont, ils se perdent

Un double récit, le second étant en abyme. La Havane au début du 21e siècle, au moment de la visite du président américain Obama et du groupe rock britannique Rolling Stones. La Havane au début du 20e siècle, au lendemain de la Guerre d’indépendance.

Un roman policier, certes, mais aussi un roman de mœurs. Plusieurs meurtres survenus dans les quartiers malfamés de la capitale cubaine. Multiples scènes sanglantes. Dialogues et monologues intérieurs souvent crus.

Les portraits des protagonistes et des personnages sont nombreux et saisissants. Les descriptions de la ville, des quartiers, des maisons et des sites sont captivantes. Les contextes historiques sont rapportés avec pertinence.

Les intrigues et péripéties s’enchaînent à un rythme accéléré. Les relations interpersonnelles sont inattendues, intrigantes ou soutenues, tout comme les ruptures sont parfois étonnantes et perturbatrices. Les dénouements sont conséquents, mais tragiques.

Des réflexions insérées tout au cours des récits interpellent le lecteur.

Bref, un polar étonnant !

Référence

Padura, Leonardo. – Ouragans tropicaux : une enquête de Mario Conde. – Traduit de l’espagnol (Cuba) par René Solis. – Paris : Éditions Métailié, 2024 © 2023. – 503 p. – (Policier Point, n° P6283). – ISBN 979-10-414-1523-6. – [Citation, p. 440]. – Bibliothèques de Montréal : PAD Leo ou. – BAnQ : Padura P125o.

Image

Arbre corail, Jatropha multifida, Euphorbiaceae. – Photo tirée de l’album Plantes en Amérique latine et aux Antilles © Claude Trudel 2025, Le monde en images, CCDMD.

Articles connexes

Le romancier Leonardo Padura
Nouvelles d’Amérique latine

Sur la Toile

[Attention : critiques révélant le contenu du roman]

2023 09 07 – Rentrée littéraire : "Ouragans tropicaux ", la mort d’un "salopard" ou le voyage au bout de la désillusion d’une Cuba sclérosée (Mohamed Berkani, France Télévisions)

2023 09 10 – « Ouragans tropicaux », de Leonardo Padura : LE romancier contemporain cubain, immanquable! (Alain Marciano, Benzinemag)

2023 11 04Les illusions perdues des Cubains : entretien avec Leonardo Padura, par Sonia Dayan-Herzbrun (En attendant Nadeau)

2023 12 16 – «Ouragans tropicaux»: La Havane, aller-retour (Christian Desmeules, Le Devoir)

2023 12 20 – Leornado Padura son nouveau livre Ouragans Tropicaux (Damien Aubel, Tranfuge)

14 janvier 2025

Plantes en Amérique latine et aux Antilles

Plantes en Amérique latine et aux Antilles

Sommaire

L’album Plantes en Amérique latine et aux Antilles :

– 600 photos légendées prises au Jardin botanique de Montréal;

– repères : liste des plantes, index des familles botaniques, index des noms latins;

– références : 9 bases de données, 6 cartes, 15 volumes.

L'album peut être consulté directement en ligne, sans téléchargement préalable.

Ce livre numérique gratuit peut être reproduit d’une façon identique à des fins non commerciales.

Introduction

Cet album présente une sélection de photos de plantes des Antilles et de l’Amérique latine (Mexique, Amérique centrale, Amérique du Sud). Ces plantes ont été photographiées dans les jardins thématiques et les serres du Jardin botanique de Montréal. Par ailleurs, les six cents photos donnent un aperçu de la diversité et de la richesse des collections végétales du Jardin botanique de Montréal.

Chaque plante photographiée est ainsi identifiée : nom vernaculaire en français, nom vernaculaire en anglais, nom scientifique de l’espèce en latin (genre et épithète spécifique et, s’il y lieu, sous-espèce ou variété), nom scientifique de la famille botanique en latin. Les noms scientifiques sont écrits en italiques.

Les données sur les espèces proviennent des étiquettes des plantes photographiées au Jardin botanique de Montréal, sauf certains noms vernaculaires anglais. Des synonymes sont insérés entre crochets. Les noms des familles sont uniformisés d’après la base de données Plants of the World Online.

Les espèces sélectionnées sont classées dans plus d’une centaine de familles botaniques, le plus grand nombre se retrouvant parmi les populaires familles Broméliacées, Cactacées et Orchidacées. Les familles botaniques Aracées, Astéracées, Gesnériacées et Solanacées sont également bien représentées.

À titre indicatif, les distributions des espèces par pays et régions sont notées d’après les informations et les cartes affichées sur les bases de données Global Biodiversity Information Facility [GBIF] et Plants of the World Online. Plusieurs descriptions d’espèces peuvent être consultées dans les volumes cités sous la rubrique documentation.

Les liens pointent sur les photographies affichées en haute résolution sur Le monde en images CCDMD). L’album compte plusieurs compléments : références (photographies, ressources, documentation), index des familles botaniques, index des noms latins, notice sur le droit d’auteur.

Référence

Plantes en Amérique latine et aux Antilles

Article connexe

Albums botaniques

05 janvier 2025

Comprendre l’astrophysique


Au tournant des années 2024 / 2025, une nouvelle revue française de vulgarisation scientifique voit le jour : Comprendre les Sciences.

Le premier numéro est dédié à l’astrophysique. Richement illustré, il propose un grand nombre d’articles portant notamment sur ces volets scientifiques :

- Le guide complet de l’Univers (Giles Sparrow)
- La théorie du Big Bang (Andrew May)
- La création d’une galaxie
- Comment les trous noirs se forment-ils? (Giles Sparrow)
- Tout ce qu’il faut savoir sur le Système solaire
- Guide complet des exoplanètes (Robert Lea)
- Combien d’étoiles y a-t-il dans l’Univers? (Ailsa Harvey)
- D’ou vient la matière noire? (Kulvinder Singh Chadha)
- Quand les étoiles deviennent des supernovæ (Colin Stuart)
- Énergie noire : la force qui déchire l’espace (Kulvinder Singh Chadha)

D'autres articles présentent les hypothèses d’univers cycliques et de multivers envisagées par certains scientifiques:

- Que s’est-il passé avant le Big Bang? (Kulvinder Singh Chadha)
- Qu’est-ce qui a provoqué la naissance de l’Univers? (Gabriele Veneziano)
- Vivons-nous dans un multivers? (Giles Sparrow)

Exemple

J’ai particulièrement aimé l’article d’Andrew May sur la théorie du Big Bang. Deux raisons expliquent pourquoi cette théorie va au-delà de l’imagination pour visualiser l’évolution de l’Univers : la possibilité de voir dans le passé lointain (la lumière voyageant à la vitesse de la lumière), l’universalité des lois de la physique (offrant la possibilité d’étudier les principes de la physique dans des laboratoires terrestres).

L’auteur relate ensuite les péripéties de la formulation de la théorie du Big Bang, avec les savants Albert Einstein, Arthur Eddington, Fred Hoyle, Edwin Hubble, Robert Dicke (Arno Penzias et Robert Wilson). Dans ce contexte, les découvertes suivantes sont expliquées : l’expansion de l’Univers, le fond diffus cosmologique (FDC), la chronologie de l’Univers, l’accélération de l’expansion de l’Univers et l’énergie noire.

Deux questions sont formulées à la fin de l’article : Des univers bulles? et L’énergie noire est-elle réelle?

Référence

« Comprendre l’Astrophysique ». – Comprendre les Sciences, n° 01, nov-déc 2024 / jan 2025. – 100 p. – ISBN 978-2-38646-187-3.

Image

L'image de l’étoile Wolf-Rayet 124 est reproduite à la page 76 du numéro initial de la revue.

Description

« The luminous, hot star Wolf-Rayet 124 (WR 124) is prominent at the center of the James Webb Space Telescope’s composite image combining near-infrared and mid-infrared wavelengths of light from Webb’s Near-Infrared Camera and Mid-Infrared Instrument. » – Crédits: NASA, ESA, CSA, STScI, Webb ERO Production Team.

Livre connexe

Astronomie et astrophysique